Site hosted by Angelfire.com: Build your free website today!
Critiques de Romans Star Trek


Critiques de Romans Star Trek, par Cat Ilina  


Un roman..., une critique : Les Cendres d'Eden  

"Les cendres de l'Eden" était le roman "Star Trek" que j'attendais avec une certaine impatience et ce, pour deux raisons. J'étais d'abord curieuse de goûter au talent d'écrivain de William Shatner. Après qu'il ait passé trente ans dans la peau de Capitaine Kirk, nous avons eu le temps de juger ses prestations d'acteur. Avec ce livre, une occasion de plus nous est donnée de découvrir ses talents de narrateur.

La seconde raison est que ce livre nous permet de voir comment M. Shatner considère son personnage. Un personnage modelé et peaufiné par trente ans de vie au petit et grand écrans. Un personnage que les scénaristes ont eu tout le loisir de développer tant et plus, ce qui devait être pour M. Shatner à la fois un avantage et un inconvénient dans l'écriture de son roman.

D'une part les détails de la vie de Kirk, de sa carrière dans "StarFleet" à sa vie sentimentale, étaient déjà bien délimités, ce qui fournissait à l'auteur-acteur un point d'ancrage solide pour sa narration. Les personnages, le cadre, tout lui était déjà livré, préfabriqué.

D'autre part, sans doute M. Shatner a-t-il dû se sentir un peu "coincé" par toutes ses convenances. Etant donné que ses futurs lecteurs connaissaient l'univers de Kirk (presque) aussi bien que lui-même, il se devait de rester fidèle à toutes les conventions de ce monde qui se doit d'être cohérent : l'univers trek. En caricaturant, on n'ose imaginer Spock devenir le temps d'un roman un gamin caractériel ! M. Shatner était donc en "liberté surveillée" dans la création de ce livre, ce qui rendait ce dernier très intéressant.

Hélas, force me fut de déchanter ! "Les cendres de l'Eden" est à l'image de "L'ultime frontière": grandiloquent à souhait mais creux au possible. Le style est informe, la cohérence de l'histoire inexistante et les personnages ridicules. En découle une lecture ennuyeuse émaillée de situations insensées, de dialogues insipides et d'humour lourdingue.

Commençons par l'histoire. Les ingrédients qui la composent sont pourtant intéressants: au final, nous avons la trahison d'un Amiral de StarFleet, la découverte de la jeunesse éternelle, la manipulation génétique (la création par clonage d'une race klingo-romulienne) et notre ami Kirk dans les bras d'une charmante damoiselle, le tout dans un même roman.

Pas mal, mais déjà vu mille fois ailleurs ! Pour la trahison de Drake, voir Terre Inconnue (mentionné d'ailleurs dans l'histoire), les magouilles génétiques, la suite livresque de Star Wars écrite par Timothy Zahn et la séduction de Kirk, à peu près un épisode sur deux de la série classique. Sans compter que les fils de l'histoire s'emmêlent et s'entremêlent. Le tout en ressort résolument brouillon et bavard.

Passons maintenant au style. Je ne suis pas écrivain, ni journaliste, mais il me semble que des phrases du style :
"Du bout des doigts, il suivit les courbes de son corps" (p. 122).
"Ils marchèrent ensemble vers le bord de l'eau, là où les vagues translucides venaient lécher le sable fin" (p. 212) sont assez convenues.

Les paragraphes innombrables ont pour effet de hacher la lecture d'autant qu'ils ne tombent pas toujours très à propos. A cela s'ajoutent des remarques d'une rare finesse telle :
"Le costume lui avait provoqué des démangeaisons dans un endroit qu'il n'osait gratter en public" (p. 17) Tout en finesse, disais-je.

Venons-en aux personnages. Les retrouver une fois de plus était ma motivation principale. Aussi me suis-je attardée sur la manière dont ils sont traités dans ce roman.
Je compte me pencher brièvement sur quatre d'entre eux : Kirk, Androvar Drake, Teilani et nos amis les Klingons.

Une seule phrase résume l'attitude de Kirk dans tout le roman : le héros, couronné de mille et un exploits, est devenu un vieux retraité, solitaire, que l'inaction rend dépressif. La facette du courageux ex-capitaine de StarFleet, capable de s'extirper des situations les plus noires ressort à chaque page du roman, à chaque pensée de Kirk ou de ses amis.

Kirk rencontre-t-il un jeune officier ? "Mais, Monsieur... Vous êtes un héros" (p. 19) est la seule phrase qu'il entend. Uhura et Chekov sont-ils en difficulté ? Une seule pensée leur traverse l'esprit : Que ferait Kirk dans pareille situation ?

Autre facette de Kirk maintes fois soulignée par le roman : celui d'un capitaine sans vaisseau. Et là, une fois de plus, le roman est sans nuance. On ne compte pas les passages mettant en exergue l'obsession de Kirk pour l'Enterprise. Il est certes naturel que Jim soit attaché à son vaisseau après qu'il l'ait commandé pendant si longtemps. Mais était-il nécessaire de rendre ce trait de caractère si redondant ?
Sans compter que, manque de chance, le vaisseau est menacé d'être définitivement désarmé et que, pire encore, tous les amis de Jim Kirk ne voient en lui qu'un capitaine déchu. Difficile de faire moins subtil..

L'autre facette de la personnalité du héros est celle d'un amoureux transi, jouant les Casanova sur le retour pour les beaux yeux d'une jeune femme. Kirk se laisse berner par cette jeune femme (qui symbolise pour lui la jeunesse éternelle) comme un gamin.
On n'ose imaginer les scènes innombrables ou Kirk et Teilani se livrent à des ébats torrides sur une plage ou dans ce qui remplace une décapotable au 23ème siècle. La fin du roman ne nous épargne pas non plus l'image, classique cette fois, du héros juste et bon qui nous brade diverses pensées pseudo-philosophiques telles que "Il faut savoir d'où on vient pour savoir où on veut aller" (p. 320).

Au final donc, le capitaine Kirk est l'image typique du héros préfabriqué dont les pensées, les qualités et les faiblesses nous sont livrées en pièces détachées. Difficile de voir notre Jim Kirk habituel dans tout ce manque de subtilité.

Là où Kirk est une victime qui se débat contre de multiples difficultés, il nous font un coupable. Et là aussi, la grossièreté de ses traits laisse sans voix. Le vilain, c'est Androvar Drake, amiral de StarFleet, ennemi juré de Kirk dont il a conduit le fils à la mort, prêt à tout pour rendre la vie du capitaine impossible.

Pour y parvenir, tous les moyens sont bons. Drake est un monstre jusque dans les moindres détails. Pour dire comme il est sadique, il collectionne même les armes anciennes dans sa maison.

Après cela, je m'interroge, je cherche... où sont donc les ennemis raffinés tels Balok, l'Orion d'"Un tour à Babel" ou Chang ? Où sont passés ces ennemis qui ont au moins le mérite de se battre pour défendre leurs idéaux et non pour assouvir une vengeance puérile et dont la cause nous est inexpliquée? Pourquoi ont-ils été remplacés par ce pantin sur qui on a collé maladroitement l'étiquette "salaud à tout faire" ?

Je passe rapidement les Klingons renégats occupés à traficoter des armes dans les bases stellaires les plus crades de la galaxie. Eux non plus ne sont pas gâtés. Ils font figures de monstres barbares, sales, idiots et avides de profit.

Sans compter cette potiche de Teilani, Pamela Anderson du 23ème siècle, beauté fatale, jouet d'un individu sans scrupules, qui n'acquiert que peu d'humanité lorsqu'elle découvre ses origines à la fin du roman. Occupée à séduire (et berner) Kirk tout au long du roman, elle donne à l'auteur l'occasion de nous servir quelques scènes sorties tout droit de Beverly Hills ou Melrose Place.

Au final, je considère cette lecture du temps perdu. Difficile de gaspiller aussi bien les possibilités qu'offre au romancier l'univers Star Trek. Par ailleurs, cela pose le problème de savoir si les romans parus au Fleuve Noir sont de bonne qualité.

Pour ma part, j'avoue que je suis souvent déçue à leur lecture. Lesquels se vendraient aussi bien s'ils ne portaient pas le label Star Trek ? Certes, Star Trek n'est pas une oeuvre shakespearienne. Mais n'est-on pas en droit d'attendre plus de qualité dans certains romans de cette veine ?

Références : SHATNER William, Les cendres d'Eden, Editions Fleuve Noir

Autres Critiques :

Assignment : Earth | L'Appel du Sang | Le Triangle Mortel
Le Monde sans Fin
Star Trek selon Nichelle Nichols | L'Enfant de Saturne
L'Homme Parfait | Devil in the Sky | TNG : Survivors | VOY : Flashback
VOY : Mosaic