Lorsqu'il se réveilla, Nick crut qu'il avait rêvé sa rencontre avec l'étrange mais, ô combien
jolie, Emira. Mais, le souvenir d'elle suçant son doigt était trop présent à son esprit pour
que ce soit un rêve. Surtout qu'il pouvait encore ressentir les sensations que ça lui avait
procuré. Il secoua la tête pour chasser ses pensées et se leva. En passant devant la
chambre où dormait Emira, il s'arrêta et ouvrit lentement la porte. Il la vit, étendue à
moitié sur le côté et le ventre, ses cheveux éparpillés sur l'oreiller, dormant paisiblement.
Il referma la porte et alla à la cuisine pour déjeuner. Nick se demandait si Emira était en
fugue ou vagabonde car elle n'avait même pas demandé d'appeler sa famille, ce qu'il
trouvait étrange, quoique ça ne l'avait pas étonné. Emira était étrange, intriguante,
fascinante... Elle ne semblait avoir peur de rien. Soudain, une odeur de brûlé le tira de ses
pensées.
- Merde! lança-t'il en retirant la poêle du feu.
Il avait laissé ses œufs trop longtemps et ils avaient brûlé. Il les jeta dans la poubelle et
décida qu'il était plus prudent de manger un reste de pizza froide qu'il sortit du réfrigérateur.
Il descendit au sous-sol avec son déjeuner-dîner et alla jouer au PlayStation. Plus tard, après
plusieurs parties, il sentit la faim le tenailler. Il remonta à l'étage et regarda l'heure. Il était
près de 5 heure et Emira n'était toujours pas réveillée. Il alla s'habiller et décida de la laisser
dormir. Il soupa devant la télé et, après une émission, il fit jouer le film qu'il n'avait pas eu
le temps d'écouter la veille.
- Salut! dit Emira en baillant.
Nick se retourna, surprit.
- Hey! Tu m'as fait peur. lança-t'il.
Elle le regarda d'un air amusé et s'assit près de lui sur le divan, étirant ses longues jambes
pour appuyer ses pieds sur la table basse. Nick ne put s'empêcher de laisser glisser son
regard de ses cuisses à ses pieds. Elle fit glisser sa main jusqu'à son genou gauche pour se
gratter et lui jeta un coup d'œil.
- Quand tu auras fini de me regarder, tu pourrais me dire quel est ce film? demanda-t'elle d'une voix nonchalante.
- C'est Scream III. répondit-il, vexé.
Il détestait son assurance presque arrogante et le fait qu'elle le prenait toujours en train de
l'examiner. Elle semblait avoir des yeux partout.
- C'est pas grave, tu sais. dit-elle, comme si elle avait lu dans ses pensées. Il ne t'arrivera
rien de mal tant que tu feras juste regarder.
Nick la regarda, essayant de savoir si elle était sérieuse.
- Rien de mal? répéta-t'il, appréhendant la réponse.
Emira ne répondit pas, les yeux fixés sur l'écran où, dans le film, la victime rampait dans
son propre sang pour tenter de sauver sa vie. À la vue de tout ce sang, Emira se mordit la
lèvre et planta ses ongles dans ses cuisses, résistant à l'envie de goûter encore au sang de
Nick. Elle se leva brusquement, chassant les images de sa tête.
- Ça ne va pas? s'inquiéta Nick.
- Je déteste les films d'horreur. mentit-elle. Je pourrais t'emprunter ta douche?
- Pas de problème. Il y a des serviettes dans l'armoire du fond.
- D'accord.
Emira trouva la salle de bain et s'y déshabilla avant d'entrer sous la douche. Elle lava ses
cheveux avec le shampooing de Nick et prit le savon qui sentait le bébé pour nettoyer sa
peau fragile. Après, elle enroula ses cheveux dans une serviette et en mit une autour d'elle
avant de sortir de la salle de bain. Elle alla dans sa chambre et fouilla dans son sac.
- Merde, c'est où!? lança-t'elle entre ses dents.
Elle retourna son sac et le contenu se déversa sur le plancher. Elle s'agenouilla par terre
et prit ses vêtements un par un en les déposant sur le lit. Elle n'avait que deux paires de
pantalons noirs, trois chandails de toutes les couleurs plus le blanc et quelques
sous-vêtements plus une panoplie de lunettes fumées.
- Non... non... marmonna-t'elle. AH! Je t'ai trouvée! s'exclama-t'elle finalement.
- À qui tu parles!? interrogea Nick, appuyé sur le cadre de la porte.
Emira se retourna vivement, ses yeux lançant des éclairs. Surprit et effrayé, Nick recula
d'un pas. Elle cligna des yeux, chassant leur air menaçant.
- Je parlais à ma bouteille de crème! répondit-elle sur un ton léger. Je croyais l'avoir perdue.
Nick hocha la tête, n'osant parler. Emira ramassa un chandail resté par terre, faisant tomber la
serviette de sa tête et se releva. Ses cheveux retombèrent pesamment sur ses épaules
blanches, descendant jusqu'à sa taille.
- Ton shampooing sent très bon. déclara-t'elle, d'une voix enfantine, en jouant avec une
mèche ses cheveux, comme si elle était tout à coup devenue timide. Et j'espère que mes
cheveux auront l'air aussi doux que les tiens.
Nick la regarda étrangement, ne comprenant pas son subit changement de personnalité.
- Bon, je dois m'habiller. dit-elle, sous-entendant qu'elle voulait qu'il parte.
- Oh! Je venais te demander si tu voulais manger des brochettes avec moi. se rappela-t'il.
- Poulet?
- Oui! Et cuites au barbecue par moi-même!
- Oh! Comment pourrais-je résister à ça!? blagua Emira.
Nick sourit, content, et la laissa s'habiller. Elle alla le rejoindre quelques minutes plus tard,
vêtue d'un pantalon noir -des jeans cette fois- et d'un chandail bleu, ses cheveux coiffés en
une longue tresse. Elle l'aida en faisant cuire des pommes de terre et mettant la table tandis
qu'il surveillait la cuisson des brochettes.
- Alors? fit Nick quand ils commencèrent à manger. Je peux savoir d'où tu viens?
- Je viens d'un peu partout. répondit vaguement Emira.
- Ça ne me dit pas grand chose! répliqua-t'il. Tu es née où?
- Dans une petite ville du Maine, près de Cape Cod.
- Stephen King! dit Nick.
- Où est le rapport? interrogea Emira, incrédule.
- C'est la ville où se passent tous ses films d'horreur. répondit-il.
- Stephen King est écrivain. précisa-t'elle.
- Anyways. Tu as quel âge?
Emira hésita quelques secondes et répondit:
- 22 ans.
- T'as pas l'air sûre?!
- Je le suis. affirma-t'elle.
- Okay. Et... qu'est-ce que tu fais en Floride?
- Tu poses trop de question. dit lentement Emira, prenant une voix dure.
Nick se tut, prenant cela comme une menace. Il aurait bien voulu ne jamais l'avoir
rencontrée mais, en même temps, il voulait en connaître plus sur elle. Elle ne semblait pas
du tout savoir qui il était et donnait l'impression qu'elle se souciait très peu de lui.
- Excuse-moi si tu as prit ça comme une menace. soupira-t'elle, comme si elle avait lu ses
pensées, encore une fois. Je n'ai pas l'habitude d'avoir quelqu'un avec qui parler.
Nick hocha la tête, ne trouvant rien à ajouter.
- Tu veux tout savoir, hein? s'enquit-elle. Alors, voici mon histoire: comme je l'ai déjà dit,
je suis née dans le Maine. J'ai vécu avec ma mère durant les 13 premières années de ma
vie avant qu'elle ne meurt. Je n'ai jamais connu mon père. Je suis allée vivre chez des
parents à nous jusqu'à mon 15ème anniversaire puis je suis partie. Ils ne pouvaient pas
me nourrir et me loger indéfiniment. Alors, depuis ce temps-là, je voyage partout au Canada,
aux États-Unis et je suis même allée au Mexique.
- Tu n'as pas de domicile fixe, alors?
- C'est ça. Je suis une SDF! (sans domicile fixe)
- Tu n'as jamais habité en appartement!? interrogea Nick.
- Oui. J'ai déjà travaillé, aussi, mais je n'ai jamais pu rester au même endroit longtemps.
répondit Emira. Je suis une nomade, en d'autres termes!
- Je vois... Ça veut dire que tu comptes repartir bientôt?
Emira sourit.
- Je ne sais pas encore... répondit-elle. J'aime bien cette ville. Je vais voir si je peux trouver
du travail, si non, je vais partir.
- Tu peux rester ici, en attendant de te trouver un appartement. offrit Nick.
- Vraiment!? s'exclama Emira.
- Oui. Ça te dépannerait et j'aurais un peu de compagnie!
- Merci!!!
Pour la première fois, Nick la vit vraiment sourire et en fut très heureux. Soudainement, son
sourire s'effaça.
- Ah... je sais pas... dit-elle.
- Pourquoi!? C'est quoi le problème? demanda Nick. Moi?
- Non. répondit-elle en souriant. En fait, oui. Je veux dire... Tu vas me trouver bizarre.
J'ai mes habitudes et je ne veux pas les changer. Je suis une personne nocturne.
- Qu'est-ce que ça change? J'aime la nuit aussi.
- Tu ne comprends pas... Je suis née comme ça! Je dormais le jour et me réveillais la nuit.
C'est encore comme ça. Pour moi, la journée commence, au plus tôt, vers 5 ou 6 heure le
soir. expliqua Emira. Je vis un peu à l'heure de l'Australie, si ça t'aide à comprendre.
- Ouais, je comprends. dit Nick. Et ça me dérange pas.
- Dans ce cas, j'accepte ton offre!