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ZSCHOKKE- Ein sanfter Rebell. Interviews
Matthias Zschokke

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Matthias Zschokke, fidèle à ses habitudes, persiste à surprendre les lecteurs en se jouant de leurs attentes. Depuis Max (1982), qui lui valut jadis le Prix Robert-Walser, le temps a passé, laissant des traces bien visibles sur les corps et dans la tête des personnages. Das lose Glück, la dernière mosaïque inachevée de l’auteur, dissèque avec humour et précision les doutes et les désillusions d’une génération.

Interview: Patricia Zurcher

P. Z. - Vos trois premiers livres, Max, Prinz Hans et ErSieEs se passaient tous à Berlin, où vous êtes vous-même établi depuis longtemps. Dans Das lose Glück par contre, Berlin n’occupe plus le devant de la scène...

M. Z. - Disons que la moitié du livre se passe quand même à Berlin... C’est là, ma foi, que je vis depuis vingt ans et comme je parle de ce qui m’est proche, Berlin figure toujours dans ce que j’écris. Je ne suis pas le genre d’auteur qui emmène ses personnages à Mexico; chez moi, le voyage conduit plutôt à l’intérieur, parce qu’il y a plein de choses autour de moi que je n’ai pas encore élucidées. J’ai l’impression que tout est là et qu’il suffit de bien regarder. Berlin suffirait donc amplement à remplir encore des livres entiers. Ce qui m’agace, c’est l’aspect mode de cette ville, je trouve cela sans intérêt. Mais il y a quelque chose dessous qui détermine réellement un lieu et les gens qui y vivent. Ce qui m’intéresse à Berlin, c’est la lumière par exemple, c’est une ville sombre en hiver, alors qu’en été, il y fait jour plus longtemps... Mais tout ce côté capitale, métropole européenne et tout cela, c’est du ramdam superflu et j’essaie de ne pas le faire entrer dans mes livres, ou alors cela n’apparaît que dans la marge, vite fait. C’est peut-être de là que vient cette impression que dans mon nouveau livre, Berlin occupe une place moins importante que dans les précédents. Et du fait aussi que dans ce livre, il y a un autre monde que j’oppose à Berlin, le monde dont je viens; il ne se limite pas exclusivement à la Suisse, il s’étend jusqu’en Italie. C’est plutôt un monde rêvé, désiré, et ce désir s’accroît de plus en plus chez moi, je me sens de plus en plus attiré par le sud, son atmosphère, la manière dont les gens interagissent, leur attitude face à la vie...

P. Z. - Ihre drei ersten Bücher, Max, Prinz Hans und ErSieEs spielten alle in Berlin, wo Sie ja auch selber leben. In Das lose Glück kommt Berlin aber eher am Rand vor: Welche Rolle spielt diese Stadt in Ihrem letzten Buch und in Ihrer eigenen Schriftstellerexistenz?

M. Z. - Ja, also die Hälfte des Buchs ist trotzdem Berlin! Es ist halt der Ort, in dem ich lebe seit 20 Jahren und da ich sehr nahe an mir dranschreibe, ist natürlich Berlin auch immer ein Bestandteil von dem, was ich schreibe. Ich bin ja nicht in dem Sinn ein Fiktional-Autor, der nach Mexiko reist mit seinen Figuren. Die Reise geht eigentlich mehr nach Innen, weil ich das Gefühl habe, dass ich noch genug nicht geklärt habe in meiner näheren Umgebung, dass da nach wie vor ein unheimliches Kosmos ist und man nur genau hinschauen muss. Berlin würde eigentlich also durchaus reichen, um ganze Bücher zu füllen. Den modischen Aspekt, also den Zeitaspekt an der Stadt, finde ich uninteressant, es ist eben so eine Mode und vergeht auch wieder. Aber da gibt es unten drunter etwas, was einen Ort wirklich bestimmt und was dann auch den Menschen, der darin lebt, auch mitbestimmt. Es interessiert mich in Berlin eben weiterhin das Licht zum Beispiel: Es ist eine dunkle Stadt im Winter und im Sommer ist es dort länger hell.

 

P. Z. - Dans Max déjà, votre premier livre, vous avez passablement malmené et remis en question le roman en tant que genre littéraire. Qu’a-t-il donc qui vous déplaît tant?

M. Z. - Il ne me déplaît pas, mais je suis incapable d’écrire un roman, je n’en possède pas les moyens techniques, et quand on n’y arrive pas, on ne le désire pas. J’aime bien les romans, j’ai du plaisir à lire Madame Bovary qui, soit dit en passant, ne respecte pas non plus la forme du roman. Mais je m’aperçois que je m’ennuie de plus en plus quand je lis des romans achevés, peaufinés; lorsqu’il s’agit de romans contemporains, j’ai l’impression que je sais déjà comment l’histoire va se poursuivre. L’histoire ne m’importe pas, car il n’en existe qu’un nombre limité en ce bas monde et nous les connaissons à peu près; leur structure, leur déroulement ne peuvent pas nous réserver de grandes surprises. Il n’y a que dans le détail que des sauts peuvent soudain se produire et irriter le lecteur; c’est cela que j’essaie de faire. Je ne veux pas démolir le roman, ni formuler une contre-proposition, ce qui m’intéresse vraiment, c’est le fait de raconter en soi. Tout auteur voudrait que son livre se mette à vivre, on voudrait créer quelque chose qui ne soit pas mort, or l’écriture consiste à tuer sans cesse. Quand on met quelque chose par écrit, on le fige à tout jamais. On produit des cadavres à la chaîne et ce faisant, on désespère...

P. Z. - Sie haben von Anfang an die literarische Gattung des Romans misshandelt und sehr in Frage gestellt. Was missfällt Ihnen denn so sehr bei ihr?

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M. Z. - Sie missfällt mir nicht, ich kann sie nicht und wenn man es nicht kann, dann will man es auch nicht. Aber an sich mag ich durchaus gern Romane. Madame Bovary lese ich sehr gerne. Obwohl der in sich ja auch ein völlig schiefer Roman ist, also die Romanform ist da auch nicht geglückt. Aber es fällt mir auf, dass ich mich zunehmend langweile an gebauten, fertigen, schönen, runden Romanen, wenn sie von heute sind. Ich habe das Gefühl, ich weiss ja, wie es weitergeht. Die Geschichte ist mir eigentlich egal, weil es ja so und soviel Geschichten auf der Welt gibt und wir sie ungefähr kennen. Es kann nicht sehr viel Neues passieren im Ablauf, sondern nur im Detail können plötzlich Sprünge stattfinden, die einen irritieren und genau das versuche ich dann auch. Ich will nicht einen Roman zertrümmern und möchte auch keinen Gegenentwurf hinstellen, sondern mich interessiert wirklich das Erzählen an sich. Jeder Autor möchte eigentlich, dass sein Buch zum Leben kommt, dass sein Buch ein lebendes Objekt wird; man möchte gern etwas schaffen, was nicht tot ist und schreiben ist unter anderem ein permanentes Töten. Wenn man etwas niederschreibt, dann ist es tot und kann nicht mehr anders werden als so, wie es da steht. Man produziert also dauernd eine Leiche und verzweifelt dabei. Irgendwie sollte das Leben da wieder reinkommen.

P. Z. - C’est donc dans l’irrégularité que se cache la vie...

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M. Z. - Oui, ou dans la régularité, cela existe aussi, quand soudain le texte se met à se répéter, à faire du sur-place, et que l’on se demande ce qui se passe. Je ne peux pas dire à quoi ressemble un livre vivant, je ne fais que constater que le roman "classique", celui qui cherche à remplir les exigences du genre, m’ennuie. Je baille quand j’ai l’impression que quelqu’un a fait cela pour me divertir, c’est un travail artificiel, ce n’est pas de l’art. Pour que cela soit de l’art, il doit y avoir quelque chose de plus, je crois, qui m’inquiète et que je ne peux plus expliquer en tant que lecteur. Je crois que l’art n’est jamais délibéré, l’art, c’est toujours ce que personne ne veut. Dès que l’on se met à l’accepter, l’art commence à mourir.

 

P. Z. - Es braucht also etwas unregelmässiges, damit das Leben wieder reinkommt...

M. Z. - Ja oder es kann auch regelmässig sein, das gibt es ja auch, also plötzlich ein Leiern, das sich wiederhohlt und wo man sich plötzlich fragt: Was ist denn jetzt los? Also wie es dann aussieht, das weiss ich auch nicht. Ich langweile mich, wenn ich das Gefühl habe, das macht einer, um mich zu unterhalten. Es ist dann Kunsthandwerk und nicht Kunst. Bei Kunst muss, glaube ich, noch etwas dazukommen, was mich beunruhigt und was ich nicht mehr erklären kann als Rezipient, was ich auch nicht will; ich glaube Kunst wird nie gewollt, Kunst ist immer das, was keiner will. In dem Moment, wo man es akzeptiert, fängt es an, abzusterben. Wir sehen ja, dass das Leben nicht perfekt ist und da fangen wir alle an zu suchen, was man da besser machen könnte, damit es endlich durchbricht, das Leben, damit es endlich anfängt zu atmen.

P. Z. - Et pour le théâtre, votre démarche est la même?

M. Z. - Oui, c’est drôle, ce n’est pas volontaire. Je ne m’en aperçois qu’après coup. En Allemagne par exemple, le théâtre qui se joue en ce moment est très physique et très rapide, plein d’action, d’images, de musique, et voilà que bizarrement, je me mets à écrire des monologues particulièrement longs... Dans ma nouvelle pièce, qui n’a pas encore été montée, il n’y a plus que des personnes assises qui parlent et parlent encore. Je ne veux pas écrire contre le théâtre d’action, je remarque seulement que quand tout s’agite autour de moi, l’envie me prend soudain de ramener le calme et d’observer ce qui se passe. Mais je ne peux le dire qu’après coup, parce que je ne le fais pas délibérément. De toute façon, on se meut toujours dans son époque, on est toujours guidé par la mode, que l’on s’y oppose ou qu’on la suive.

P. Z. - Und fürs Theater gehen Sie gleich vor?

M. Z. - Ja, es ist komisch, obwohl ich das nicht will. Ich merke es erst nachträglich. In Deutschland herrscht ein sehr körperliches Theater, ein sehr schnelles, aktionsreiches, bilderreiches, musikalisch und körperlich betontes Theater und in der gleichen Zeit schreibe ich komischerweise betont lange Monologe... Das neuste Stück, das noch nicht aufgeführt worden ist, sind nur noch Leute, die sitzen und noch länger reden. Ich will nicht gegen dieses Aktionstheater schreiben, ich merke nur, dass wenn sich alles so um mich bewegt, ich endlich einmal den Wunsch habe, Ruhe einkehren zu lassen und mal zu schauen, was eigentlich los ist. Ich will jetzt Ruhe haben auf der Bühne, weil alles sich bewegt. Und das kann ich eben erst rückwirkend sagen, weil ich das nicht absichtlich mache. Man bewegt sich immer in der Zeit, in seiner Zeit, man ist immer modisch, entweder antizyklisch oder dann mittendrin in der Mode.

P. Z. - Vos personnages, bien qu’ils refusent toujours un peu de devenir de vrais personnages, ne sont pas non plus de pures créations de l’esprit, ils ne détonnent pas dans cette fin de siècle...

M. Z. - Non, je trouve que ce sont des personnages parfaitement réels, tangibles, et qu’ils n’ont rien d’expérimental ou de construit. Je pense que les gens autour de moi sont comme eux et que je suis comme eux. J’ai l’impression que je décris notre époque dans les domaines que je vois, la Suisse, l’Allemagne; je décris vraiment une situation sociale précise, un regard sur le monde. On me dit souvent: "ce n’est pas comme cela que je me vois", "je ne trouve pas que nous sommes comme cela", "nous ne sommes pas à bout comme tes personnages"... Mais moi je trouve que nous sommes à bout comme eux. Je trouve que l’agitation actuelle, et pas seulement au théâtre, ressemble à la course vaine du hamster dans sa roue. En réalité, les gens sont complètement au bout du rouleau et ne savent plus quoi faire. Il y a quelque chose d’une ambiance fin de siècle dans tout cela, je crois que nous sommes désemparés, mais que nous ne voulons pas l’admettre.

P. Z. - Ihre Figuren, obwohl sie nie so richtig zu echten Figuren werden wollen, sind aber auch keine reinen Hirngespinste; sie passen eher gut ins zwanzigste Jahrhundert.

M. Z. - Ja, ich finde, es sind absolut reelle, also handfeste Figuren; das ist überhaupt nichts experimentelles oder ausgedachtes. Ich meine, dass die Leute um mich herum so sind und auch ich so bin. Ich habe das Gefühl, ich beschreibe unsere Zeit in den Bereichen, die ich überhaupt sehe, ich beschreibe da wirklich eine präzise gesellschaftliche, empfindungsmässige Gefühlslage, eine Sicht auf die Welt. Ich höre zwar immer, dass man mir sagt: Wir sind doch nicht so am Ende. Ich finde jedoch, wir sind so am Ende, ich finde dass dieses ungeheuer Bewegte, was jetzt so schäumt, eine Art Hamsterrennen im Rad ist. An sich sind die Leute vollkommen fix und fertig und wissen nicht weiter. Es geht jetzt auf eine Jahrhundertwende zu und wir wissen nicht, was jetzt gut war und was nicht, was wir neu beginnen könnten, was man tun könnte. Alle starren auf diese Zukunft und schauen zurück und sagen: Ich weiss auch nicht.

P. Z. - Vos personnages ont toujours un peu de peine quand il s’agit de s’adapter à la société dans laquelle ils vivent...

M. Z. - Oui, justement, parce que je crois que la société ne s’avoue pas la vérité, la société affirme toujours être autre chose que ce qu’elle est. C’est pour cela qu’il y a ces personnages qui disent "désolé, ce n’est pas ma vision des choses, je voudrais sortir un moment de tout cela et pouvoir dire que je me sens plutôt comme cela". En cela, ils ne sont pas des prototypes de notre société, ils vivent plutôt dans la marge, mais ce n’est qu’un pas qu’ils ont franchi consciemment. Ils ne s’opposent pas à la société, ils sont la société; simplement, ils ont effectué ce petit pas supplémentaire qui consiste à dire qu’ils se sentent un peu bizarres, un peu étrangers dans leur peau, dans leur entourage... Je pense qu’on en serait tous là si on avait le courage de se l’avouer. Mais c’est douloureux, bien sûr, de se rendre compte que l’on a perdu la cadence et que l’on n’a plus envie de fonctionner...

P. Z. - Ihre Figuren tun sich aber auch immer wieder schwer, wenn es darum geht, sich der Gesellschaft anzupassen, in der sie leben...

M. Z. - Ja eben, weil ich meine, die Gesellschaft gibt das nicht zu. Sie behauptet immer etwas anderes zu sein, als das, was sie ist. Und deswegen gibt es jetzt eben diese Figuren, die sagen: Es tut mir leid, mir kommt es nicht so vor, ich möchte einmal kurz austreten und sagen, ich fühle mich eher so... Insofern sind sie keine Prototypen unserer Gesellschaft, sondern eher randständig. Aber das ist nur ein bewusster Schritt; sie tun sich nicht schwer mit der Gesellschaft, sie sind die Gesellschaft und haben einfach den kleinen Schritt, den zusätzlichen getan.

 

P. Z. - Max, autrefois, rêvait de pouvoir être enfin comme tout le monde. Mais dans Das lose Glück, vous n’exaucez toujours pas ce voeu...

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M. Z. - Il se peut que Max, à l’époque, se soit senti extérieur à cette société et qu’il s’y soit frotté. Mais les personnages de mon dernier livre font partie de la société, ils y occupent leur place et ne veulent plus devenir comme les autres, parce qu’ils le sont déjà. C’est peut-être pour cela que le conflit se situe encore beaucoup plus à l’intérieur d’eux-mêmes. D’un côté, on devient de plus en plus indépendant, parce que l’on peut se passer d’ennemis, on n’a plus besoin des ennemis extérieurs. Mais à l’intérieur, ces personnages sont de plus en plus désemparés.

P. Z. - Max träumte früher davon, endlich einmal gewöhnlich, so wie alle sein zu dürfen. Diesen Wunsch erfüllen Sie Ihren Figuren aber auch diesmal, in Das lose Glück, nicht?

M. Z. - Es kann sein, dass Max sich noch mehr als Gegenüber gesehen hat und sich an diese Gesellschaft gerieben hat. Doch die Figuren jetzt, die sind ja in der Gesellschaft, die haben ihre Positionen eingenommen innerhalb der Gesellschaft und wollen gar nicht mehr wie die anderen werden, weil sie schon so sind. Deshalb liegt vielleicht der Konflikt noch viel mehr in ihnen drinnen. Einerseits wird man immer souveräner, weil man verzichten auf Feinde kann, weil man die äusseren Feinde nicht mehr braucht und andererseits sind die Figuren immer mehr in sich selbst verloren.

P. Z. - Jadis, dans Max, vous répondiez au lecteur qui demandait: "et alors?": "Cette soif de savoir, je ne l’étancherai pas. Une soif étanchée n’est pas une soif."
La littérature n’a donc pas à fournir des réponses, ni à remplir des attentes?

M. Z. - Non, je trouve que la plus belle chose qu’un livre puisse déclencher, c’est de désécuriser le lecteur, de le pousser à s’interroger. Un livre est bon quand il me déstabilise et me réveille, bien qu’il dise ce que je pense moi aussi, mais d’une manière simple et incontournable. Un livre doit me pousser à me confronter à mes propres pensées. Je trouve un livre incroyablement riche s’il se sert de moi, s’il m’utilise en tant que lecteur, s’il m’intègre et m’autorise à penser encore quelque chose.

P. Z. - Den Lesern, die fragen: Und was nun?, haben Sie schon damals in Max geantwortet: "Solchen Wissensdurst werde ich nicht löschen. Ein gelöschter Durst ist kein Durst." Literatur soll also keine Antworten liefern und auch keine Erwartungen erfüllen?

M. Z. - Nein, ich finde, das Schönste, was ein Buch auslösen könnte, wäre wirklich, dass es einen beim Lesen plötzlich unruhig macht und weckt, obwohl es das sagt, was man selber auch denkt. Also, ich finde ein Buch unheimlich reich, wenn es mich braucht, wenn es mich als Leser bedient und mich als ein Gleichberechtigter integriert, der praktisch mitsitzt und sich auch erlauben kann, noch etwas zu denken.

P. Z. - Les fragments semblent avoir plus de valeur à vos yeux que le tout...

M. Z. - Oui, mais il existe de nombreuses théories à ce sujet, je ne les ai pas inventées. Ce sont les romantiques qui ont commencé, qui ont créé volontairement des fragments, afin que le spectateur ou le lecteur supplée par l’imagination. Quand j’imagine un nez, il est généralement plus beau que celui que je pourrais voir. Mais dans le fond, on ne peut pas créer des fragments, le résultat est toujours un peu kitsch, bien que ce soit très intéressant. Moi-même, je ne crée pas de fragments, je préfère les morceaux, les morceaux achevés, ceux dont je me dis qu’ils sont justes comme cela, qu’ils peuvent rester ainsi. Mais je n’ai pas de programme. Parfois, je me donne toutes les peines du monde pour raconter vraiment une histoire d’un bout à l’autre, mais il y a toujours un moment où je m’aperçois que ce n’est plus qu’un marathon, que de la discipline, et que je ne le fais plus que parce que j’ai décidé de le faire... Il me semble que ce n’est pas nécessaire.

P. Z. - Fragmente scheinen in Ihren Augen mehr wert zu haben als das Ganze, weshalb?

M. Z. - Ja, früher gab es ganze Bewegungen und Theorien über Fragmente, auch in der Literatur hat man Fragmente geschaffen, Gedichtfragmente, oder in der Architektur. Doch eigentlich kann man Fragmente nicht schaffen, das wird dann immer so ein kitschiges Zeug, aber es ist wahnsinnig interessant. Selber schaffe ich nicht Fragmente; ich habe lieber Stücke, fertige Stücke, von denen ich dann denke, die können so stehenbleiben... Doch ich habe kein Programm. Ich kann einfach nicht eine runde, fertige Geschichte erzählen, weil ich mich dann langweile...

 

P. Z. - Est-ce un hasard si après Brut et Piraten, votre nouveau livre se déroule lui aussi sur un bateau, mais sur un yacht cette fois-ci?

M. Z. - Je ne me suis dit qu’après coup que cela commençait à faire un peu beaucoup de bateaux, mais c’est si pratique, un bateau, parce que l’on peut oublier le monde, on peut le laisser derrière soi et se concentrer sur les gens qui sont à bord.

P. Z. - Ist es ein Zufall, dass nach Brut und Piraten wieder eins Ihrer Bücher auf einem Schiff spielt, doch diesmal auf einer Yacht?

M. Z. - Ich weiss nicht, aber es ist so praktisch, so ein Schiff, weil man die Welt draussen vergisst; man kann sie also weglassen und sich wirklich konzentrieren auf die Leute, die da sind...

P. Z. - Dans le fond, ce qui vous intéresse, ce sont les relations entre les êtres?

M. Z. - Oui, j’adorerais écrire des histoires d’amour, de véritables histoires de relations; mes histoires traitent toujours d’êtres humains et de la relation que l’on entretient avec quelqu’un, des problèmes que cela pose et de ce désir de pouvoir enfin agir "juste" avec quelqu’un.

P. Z. - Die Verhältnisse zwischen den Menschen sind von Anfang an zentral gewesen in Ihrem Werk...

M. Z. - Ja, ich würde weiterhin rasend gern wirkliche Liebesgeschichten erzählen, wirkliche Beziehungsgeschichten. Es geht immer um Menschen und um den Umgang mit einem, um die Schwierigkeiten, miteinander umzugehen und um die Sehnsucht, endlich mit jemandem umgehen zu können.

Larguez les amarres!

Das lose Glück, le titre du dernier livre de Matthias Zschokke, résume à lui seul l’idée phare de l’ouvrage: au diable les attaches et les contraintes, le bonheur se cache dans chaque bribe de vie, pas la peine de les relier entre elles. Après tout, lien n’est-il pas synonyme de chaîne?

Pour se libérer des attentes qui pèsent sur eux, quatre amis d’enfance quittent parfois la terre ferme pour se laisser flotter sur un yacht et se raconter des histoires. Ou plutôt des petits bouts d’histoires, des impressions, des observations... Mais attention, l’artifice a été banni de ce bateau: inutile donc de servir des récits bien ficelés, ceux-ci ne font que déformer la réalité. De plus, ils détournent l’attention de ce que l’on est en train de vivre.

Tout aussi touchants dans leur intégrité que l’étaient jadis Max, Prinz Hans ou ErSieEs, d’autres grands personnages de Zschokke, les membres de ce drôle d’équipage sont cependant nettement moins insouciants. Ils ont passé le cap de la quarantaine, ont largué pas mal d’espoirs, ils mesurent le temps qui passe et voudraient le retenir. La solitude et la résignation les guettent.

Et pourtant, jamais Das lose Glück ne sombre dans la lourdeur ou l’ennui. On rit, on sourit, on s’attendrit, alors que l’action est absente et que les personnages n’en sont pas vraiment. C’est le regard de l’auteur sur les petits riens de l’existence, un regard si drôle et si faussement naïf, qui nous entraîne le pied léger dans les recoins de l’existence. Présenté ainsi, hors de son contexte et sans préparation aucune, tout redevient visible et digne d’intérêt pour un lecteur à qui l’on a rendu, le temps d’un livre, sa curiosité d’enfant.

Patricia Zurcher

Repère

Matthias Zschokke est né à Berne en 1954. Après une formation d’acteur à la Schauspielschule de Zurich, il a joué trois ans à Bochum. En 1980, il va s’établir à Berlin, où il commence à écrire. Il est l’auteur de six livres en prose, de quatre pièces de théâtre et de trois films. Disponibles en français: Max, trad. Gilbert Musy, éd. Zoé, 1988. L’Heure bleue ou la nuit des pirates, trad. Gilbert Musy, éd. Zoé, 1993. L’Ami riche, trad. Gilbert Musy, in Mimos, Revue de la Société Suisse du Théâtre, N°3, 1997. Matthias Zschokke a reçu notamment le Prix Robert-Walser pour Max et le Prix Gerhard-Hauptmann pour sa pièce Die Alphabeten.






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literaturpreis der stadt bern

«Ich werde als schwieriger Fall behandelt»

Heute Abend erhält er einen weiteren Preis: Matthias Zschokke wird mit dem grossen Literaturpreis der Stadt Bern für sein Gesamtwerk geehrt. Der Berner Autor, Dramatiker und Filmer lebt seit 1980 in Berlin.
*Gespräch: Michael Angele, Berlin
BZ: Matthias Zschokke, bestimmt werden Sie oft auf Robert Walser angesprochen. Es gibt da eine ähnliche poetische Aufmerksamkeit für die kleinen Dinge, eine ähnliche positive Versponnenheit und, natürlich, gemeinsame biografische Bezüge.
Matthias Zschokke: Nein, das passiert merkwürdigerweise eher selten. Die Leute trauen sich nicht. Walser ist ja ein Heiliger. Ich finde natürlich schon, dass er ein ganz grosser Dichter ist. Vielleicht kommt etwas eher allgemein Schweizerisches dazu, dieses Kleinmachen.
Es gibt dieses wunderbare Walser-Motiv in Ihrem letzten Buch «Das lose Glück», wo ein paar Schweizer die deutschen Kellner ...
... darin unterweisen, wie man sich ducken und dienen kann und dabei trotzdem heimlich denkt, dass man der Beste ist. Man muss dazu sagen, dass die Schweizer Schriftsteller hier in Deutschland als Exoten wahrgenommen werden. Walsers Dichtung wird oft als kauzig empfunden. Tatsächlich ist sie präzise. Ich lese Walser peu à peu, und neulich sind mir ganz abgedrehte Dialogszenen aufgefallen. Ich dachte, die muss man sofort auf die Bühne bringen. Leider wird Walser ja nur sehr selten gespielt, stösst auf Widerstände. Da gibt es unglücklicherweise auch eine Parallele zu meinen letzten Stücken ... Was ich sagen will: ich kann herzlich lachen bei Walser.
Kennen Sie diese Anekdote von Kafka, der ...
… seine eigenen Texte liest und fast stirbt vor Lachen. Das ist natürlich ein Lachen aus tiefer Verzweiflung. Man merkt, der geht fast drauf und dann befreit er sich dann noch einmal mit diesem Lachen. Aber, wie gesagt, man sollte die Parallele wirklich nicht zu stark ziehen.
Sie haben doch 1981 den Robert-Walser-Preis der Stadt Biel für «Max» bekommen.
Das ist nur der Name für einen Preis für ein Erstlingswerk. Es gibt ja noch ganz oberflächliche, dumme biografische Bezüge, er hat eine Schauspielschule besucht, ich auch. Berlin …
«Das lose Glück», das sowohl in Berlin als auch im Seeland angesiedelt ist, nimmt das Motiv der Heimat auf, wie schon Ihr Film «Der wilde Mann» von 1988. Nicht kitschig, eher im Sinne eines «negativen Heimatromans». Finden Sie diese Bezeichnung daneben?
Sehr daneben. Der Film spielt an einem sehr exotischen Ort, und im neuen Buch geht es eher um eine Art Sehnsuchtsort. Die Berliner Figur zieht es ja dorthin. Auch im ersten Werk kommt einer von aussen in dieses Dorf in der Schweiz, aber es ist der befremdliche Blick von innen. Als ich den «wilden Mann» gedreht habe, war ich schon zehn Jahre im Ausland. Man sollte das also nicht zu biografisch sehen.
Nein, aber es wäre eine schöne Klammer im Hinblick auf die Preisverleihung in Ihrem Heimatort. Apropos Heimat: Gut hat mir die lakonische Episode gefallen, wo Biel als nichts Besonderes gezeigt wird, aber - so heisst es -, wenn man sich dort einen schönen Tag machen kann, dann ist das gut so.
Das ist nicht nur Biel, da sind auch La Chaux-de-Fonds und sogar Bergamo in die Beschreibung eingeflossen. Ich sehe schon, es wird schwierig für Sie, das zusammenzufassen.
Stimmt, aber ich denke, man darf ruhig merken, dass unser Gespräch an einem Sonntag-nachmittag in einem Berliner Kaffeehaus geführt wurde. Etwas anderes: Mir ist aufgefallen, dass Sie oft als Aussenseiter oder auch als Unzeitgemässer dargestellt werden. Nerven solche Klischees?
Sicher tun sie das. Ich werde als schwieriger Fall behandelt. Leider. Bin ich überschätzt, werde ich unterschätzt? Es gibt eigentlich nur einen Massstab: den Markt. Daher hat die Sache schon eine konkrete Wahrheit. Hier in Deutschland ist es mit dem Fall der Mauer für die Schweizer Literatur sehr schwer geworden. Fakt ist, dass ich nicht existiere. Auf dem Markt. Das glauben manche Leute nicht, die wissen, dass ich Preise bekommen habe, und meine Bücher ordentlich besprochen wurden. Dabei ist es so: Ich bekomme einen Preis, dann tauche ich wieder ab, dann tauche ich wieder für einen Preis auf. Leider kommt das bei der Leserschaft auch so an. Beim Film gibt es das Wort vom Festivalfilm.
Ihre Situation ist doch bis zu einem gewissen Grad typisch. Die Schweizer Suhrkamp- und Luchterhandkultur hatte eben ihre Zeit. Erinnern Sie sich an Felix Böni?
Franz. Franz Böni. Der war wirklich ein legitimer Erbe von Robert Walser. Wahrscheinlich lebt der ja noch irgendwo und schreibt immer noch. Man weiss es aber nicht, denn er ist eben nicht präsent.
Sie werden dagegen mindestens von der Kritik stark wahrgenommen, sind geradezu ein Liebling der Kritik. Ich zitiere ein Beispiel: «'Das lose Glück' ist ein schwerelos geglücktes Kunststück. Es beschreibt Ereignislosigkeit und lässt daraus eine Welt voller Ereignisse entstehen.»
Auch im Internet gibt es jetzt eine ganze Menge über mich - zu Walsers Zeiten gab es das Internet ja noch nicht… Unlängst druckte auch die Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ) eine ausgezeichnete, sehr eigenständige Kritik, ich habe den Namen des Rezensenten vergessen, es war offenbar jemand, der nicht im Betrieb war, einfach ein Leser, dem das zugeteilt wurde. Leider achten manche Leser primär darauf, wer die Kritik verfasst, es gibt eine A- und eine B-Kritik. Das ist halt so. Apropos Walser: der war auch gar nicht so verkannt, wie es die Legende will, er hatte sogar ein richtiges Netzwerk zu seiner Zeit.
Ein anderer Kritiker Ihres neuen Buchs hat auf Goethes «Märchen der deutschen Ausgewanderten» hingewiesen. Man ist auf der Flucht und hält sich mit dem Erzählen von Geschichten über Wasser. Ihr Buch spielt ja buchstäblich auf dem Wasser und besteht, ebenso buchstäblich, aus Unterhaltung. Mir scheint aber, dass Sie ein gespaltenes Verhältnis zum Erzählen haben. Da ist immer wieder eine Stimme, die sagt: Vorsicht, nicht zu glatt! Es ist Ihnen suspekt, wenn eine Geschichte einen Anfang, eine Mitte und ein Ende hat.
Ja, ich habe Goethes Text tatsächlich gelesen, allerdings erst nachdem ich diese Kritik gelesen hatte ... Nun, ich habe nichts gegen einen Anfang, eine Mitte und ein Ende. «Madame Bovary» von Flaubert zum Beispiel hat all dies, zeigt aber auch die Brüche. Das war eine Vergewaltigung, den Stoff in diese Form zu zwingen. Eine titanische Anstrengung, das zurechtzubiegen. Als Leser selbst brauche ich das geschlossene Erzählen nicht mehr. Ich glaube, wir Schriftsteller unterziehen uns heute manchmal viel zu schnell den Bedürfnissen der Leser. Aber es gibt ja auch eine moderne Tradition von offenen Formen; im Moment lese ich mit Begeisterung Claude Simon. Das ist so herrlich unfertig. Man wird am Schluss nicht wissen, ob etwas passiert ist. Es zählt nur gerade das, was im momentanen Akt des Lesens geschieht.
Sie sind offensichtlich ein passionierter Leser. Auch Ihre Bücher sind in einem emphatischen Sinn für Leser geschrieben, Ihre Figuren selbst sind ja vor allem Leser. Der Kunst einer solchen Leser- Literatur sind wohl keine Grenzen gesetzt, der Verbreitung schon eher.
Wahrscheinlich. Ich verstehe aber gar nicht, was die so genannten «anderen» Leser tun. Wenn man etwa im Zug beobachtet, wie schnell manche Mitfahrer die Seiten ihres Buches umblättern, fragt man sich doch: Was ist das für ein Vorgang? Es gibt wohl eine Übereinkunft zwischen Autor und Leser, die ich beim Film viel eher verstehe.
Aber Sie pflegen ja auch ein «filmisches» Schreiben, das an den «Nouveau Roman» erinnert. In «Das lose Glück» ist dieses gleichschwebende Registrieren der alltäglichen Dinge sehr schön, manchmal auch ermüdend.
Das ist ja auch nicht ein Buch, das man in einem Zug durchlesen kann. Ich hatte, ehrlich gesagt, auch den Anspruch, dass man es an einer beliebigen Stelle aufschlagen kann und sich nach etwa zehn Sätzen darin einfinden wird. Ich wünschte mir ein Buch, wo der Leser immer wieder einsteigen und aussteigen kann.*



BERNER ZEITUNG, 7.12.2000





«Gegen alle Vernunft sterben die Walsers ja nicht aus...»

LITERATUR / Was will Literatur heute noch? Was bewirken Literaturpreise? Schreibt es sich in Berlin anders als in Bern? Fragen wie diesen hat sich Matthias Zschokke, Träger des Grossen Berner Literaturpreises 2000, gestellt. Und gleichzeitig lässt er das Publikum in einer eigens verfassten Glosse einen ganz privaten Blick in die Garderobe bzw. den Geldbeutel eines Literaturpreisträgers tun.

• INTERVIEW: CHARLES LINSMAYER

Heute Abend wird dem in Berlin lebenden, aus Bern gebürtigen Erzähler, Dramatiker und Filmemacher Matthias Zschokke im Kornhaus der diesjährige Grosse Berner Literaturpreis überreicht. Im Gespräch mit dem «Bund» beantwortet er Fragen zu seinem Werk, zu seiner Art zu arbeiten und seinem Verhältnis zu Bern und der Schweiz.

«Bund»: Matthias Zschokke, Sie haben im Juni einen Buchpreis des Kantons Bern erhalten, heute Abend wird Ihnen der Grosse Literaturpreis der Stadt Bern verliehen. Was löst diese öffentliche Anerkennung in Ihrer Geburtsstadt in Ihnen aus? Was bedeutet sie für Sie?

Matthias Zschokke: Eben gerade hat mir jemand erzählt, dass Napoleon nach jeder geschlagenen Schlacht nur eine einzige Frage umgetrieben habe, und zwar: Wie redet man zuhause darüber. Also wurden ihm jeweils auf schnellstmöglichem Weg die Reaktionen aus Paris übermittelt, die er aufmerksam bis ins kleinste Detail registrierte. Was ihn aber noch viel mehr als dieses offizielle Echo interessiert habe, sei gewesen zu erfahren, wie sie in Ajaccio über ihn redeten. - Aber nicht dass Sie jetzt schreiben, der hält sich für Napoleon und vergleicht seine Bücher mit Schlachten!

1994 ist in Bern Ihr Stück «Die Alphabeten» uraufgeführt worden. Da ist dargestellt, wie zwecks Aufrechterhaltung des Kulturbetriebs Preise an Scharlatane und Schönredner vergeben werden, während das einzige wirkliche Talent, die Autorin Susanna Serval, nach einer einmaligen, durch ihren Entdecker bewirkten Berücksichtigung zur Stripperin verkommt. Hat sich die Praxis der Literaturförderung grundlegend geändert, seit Sie jenes Stück schrieben, oder ist die Sache dort einfach überscharf satirisch verfremdet?

In den «Alphabeten» geht es um die grundsätzliche Frage, ob es möglich ist, dass ein Dichter wie zum Beispiel Robert Walser schon zu Lebzeiten erkannt und zugelassen werden kann - und ich meine damit wirklich erkannt und zugelassen, akzeptiert, mit Raum und Mitteln, die es ihm erlauben, seine Existenz so zu leben, wie er das für richtig hält. Oder ob die Walsers vom Tageskulturbetrieb in alle Ewigkeit verkannt und untergepflügt werden. Ich fürchte, das Zweite ist der Fall. Kunst und Gesellschaft scheinen zwei Pole zu sein, die sich abstossen. Ich rede nicht von einzelnen Preisen, Anerkennungen, Zusprüchen. Die hat selbst Walser bekommen - von heute aus gesehen grotesk wenig, sicher, aber er hatte durchaus seine Bekanntheit. Vom Antimagnetismus dieser beiden Pole handelt das Stück - und endet offen, denn gegen alle Vernunft sterben die Walsers ja nicht aus, sondern tauchen immer mal wieder auf, immer genau dort, wo man sie nicht vermutet, und schwimmen da ihren absonderlichen Stil. Um im Stück zu bleiben: Ich denke, Susanna Serval wird hinter dem Schlussvorhang weiterschreiben, und hoffentlich gut.

In Ihrem jüngsten Roman, «Das lose Glück», resignieren Mittvierziger wie Sie an der Möglichkeit von Visionen und finden sich mit dem «würgenden Elend des Gemütlichen» und der «Monstrosität des Gemässigten» ab. Kommt darin irgendwie das Lebensgefühl der Nach-Achtundsechziger-Generation zum Ausdruck?

Die Personen im «Losen Glück» haben Zeit zum Wahrnehmen des Moments und den Mut dazu. Das ist eine alte Geschichte, doch bleibt sie immer neu.

Im Vorwort zu «ErSieEs» haben Sie 1986 geschrieben: «Im Grunde würde ich mich auf den Barrikaden besonders wohl fühlen.» Wie stehen Sie zu jener Literatur, die direkt oder indirekt auf die Gesellschaft einwirken, sie irgendwie zum Besseren verändern will?

Das könnte man doch fast als eine Definition von Literatur nehmen: dass sie immer alles zum Besseren verändern will. Wer einverstanden ist mit dem, wie es ist, wird kaum anfangen zu schreiben. Das bedeutet natürlich nicht aufzuschreiben «drum links zwei drei» oder «drum rechts zwei drei». Das ist albern und gehört, wenn überhaupt, in die Tagespolitik. Vielleicht eher so etwas wie Freiheit in Köpfe bringen, Sauerstoff, Anstiftung zum eigenen Denken. «Der Mond ist aufgegangen . . .», diese Literatur meine ich, das ist befreiend, das ist politisch.

Sie werden in letzter Zeit gerne mit Beckett verglichen. Sehen Sie sich auch selbst in der Nachfolge seiner absurden, skurrilen, manchmal auch todtraurigen Komik?

Ich habe von Beckett gerade «Molloy» gelesen, ein ungeheuer komisches und tieftrauriges Buch! Herrlich. Ob es mich für die Zukunft geprägt hat, wird sich zeigen.

Sie betätigen sich (erfolgreich) gleichzeitig als Erzähler, Dramatiker und Filmemacher, ja es gelingt Ihnen immer wieder, die verschiedenen Formen einander anzunähern. Wo liegt der Grund für diese Vielseitigkeit?

Angefangen bei Goethe, der Lyriker, Prosaist, Übersetzer, Dramatiker, Regisseur, Intendant, Minister usw. war, bis hin zu unserer Nähe - Frisch, Dürrenmatt oder lebenden Kollegen: Jeder versucht (oder hat versucht), sich auf alle nur erdenkliche Arten auszudrücken. Um noch einmal Napoleon zu bemühen: Es ist wie das Stürmen einer Festung von allen Seiten. Wer sich ganz auf Kunst einlässt, wird unweigerlich mit deren verschiedenen Gattungen konfrontiert. Und je mehr ich mich damit beschäftige, desto mehr fasziniert mich jedes Genre mit seinen eigenen Gesetzen.

Der Krimi ist im Trend, der gegenwärtige Literatur-Boom ist im Wesentlichen ein Boom ihrer Unterhaltsamkeit und ihrer Entertainment-Komponente: Bücher als Freizeitunterhaltung der smarten Art. Wie stehen Sie dazu?

Solche Bücher langweilen mich. Ich werde unleidig und nervös, wenn mich jemand unterhalten will. Wie einer sich selbst unterhält, wie er es aushält mit sich, nur das interessiert mich.

«Das lose Glück» ist auch ein Buch über die Sprache, über ihre Tragfähigkeit, über die Möglichkeit des Erzählens. Würden Sie der Vermutung etwas abgewinnen können, dass Ihre stupend-moderne, aufgebrochene, diskursiv-assoziative Art des literarischen Gestaltens damit zusammenhängt, dass Erzählen im traditionellen, linearen Sinne eigentlich gar nicht mehr möglich ist?

Es ist immer alles möglich. Mein Ziel ist - und wahrscheinlich nicht nur meines - die grösste Einfachheit und Wahrheit. Solange es anders herauskommt, muss ich es halt wieder und wieder versuchen, solange, bis es aufgeht. Alles, was der Wahrheitsfindung dient, soll mir recht sein, ob traditionell, linear oder diskursiv-assoziativ.

Schon Ihr erster Roman, «Max», ist 1980/81 in Berlin entstanden, wo Sie auch heute noch leben. Hängt die Modernität, der experimentelle Charakter Ihres Schreibens irgendwie mit Ihrem Leben in Berlin zusammen?

Ich habe so meine Trampelpfade, die gehe ich entlang. Ob am Horizont die Skyline von Berlin oder die vom Gurten zu sehen ist, das scheint mir für die Art meines Schreibens unwesentlich. Ich zottle halt so hin. Natürlich tauchen in meinen Büchern Kanäle und U-Bahnen auf anstelle von der Aare und den Trams. Aber ich schreibe schliesslich nicht über Kanäle und U-Bahnen, sondern übers Dasein, und das spielt sich überall in unseren Breitengraden ähnlich ab.

Könnten Sie sich vorstellen, in Bern zu leben und zu arbeiten? Wenn nein, was müsste sich ändern, damit Sie es könnten?

Früher konnte ich immer leicht erklären, warum ich in Berlin lebe: Es war billiger als die Schweiz. Inzwischen sind die Preise gestiegen, und das Argument zieht nicht mehr. Doch jetzt habe ich mich daran gewöhnt. Und kann mir immer sagen, es gibt einen Ort, der ist schöner als da, wo ich bin. Das ist tröstlich. Würde ich in Bern leben, würde es schwierig, einen solchen Ort als Ersatz ausfindig zu machen.














Lesung im Heinrich-Heine-Haus/ Düsseldorf, 11. Oktober 2oo6

Matthias Zschokke: «Der Anzug»

In meinem Leben beansprucht Geld geradezu unanständig viel Raum: dauernd denke ich darüber nach, wie ich zu welchem kommen könnte. Wonach man sich sehnt, nimmt in unserer Vorstellung desto schönere Eigenschaften an, je weniger Anstalten es macht, aufzutauchen. Nur was vorhanden ist lässt sich getrost vergessen.

Dass das Schreiben eine brotlose Kunst ist, davon hat jeder schon einmal gehört. Ich will diese Tatsache hier nicht zum elfundneunzigsten Mal aufwärmen. Doch habe ich neulich von einer Ärztin gehört, ihre Eltern hätten ihr nicht nur von einer künstlerischen Laufbahn abgeraten, sondern ihr jeglichen Kontakt, ja selbst das Sprechen mit Schauspielern, Malern oder Schriftstellern strengstens untersagt, so ansteckend sei ihnen deren Armut vorgekommen. Das gab mir dann doch zu denken. Möglicherweise haben sich diese Eltern manchmal insgeheim gefragt, von was solche Hungerkünstler überhaupt leben. Die Antwort ist: unter anderem von Preisen.
Heute werde ich von der Stadt Bern zwanzigtausend Franken bekommen. Wer einen lebenden Autor und dessen Einkommensverhältnisse kennt, wird sich vorstellen können, was für eine Erleichterung diese Nachricht mir verschafft hat. Schauen Sie sich das obenstehende Jugendfoto an - wir leben schliesslich nicht mehr in der Epoche des Worts, sondern in der des Bilds. Nachdem bekannt wurde, dass ich diesen Preis erhalten soll, bat man mich um ein Foto, das man der Dokumentationsmappe beilegen wolle. Ich schaute meine Bilder durch auf der Suche nach einem vertrauenerweckenden, preiswürdigen Portrait - und wurde blass. Auf fast allen Bildern trage ich diesen Anzug! Das war mir bislang nicht bewusst: Da ich immer nur zu offiziellen Anlässen fotografiert werde, und da ich einen Anzug für das einzig wirklich offizielle Kleidungsstück halte, trage ich auf Fotos immer einen Anzug, und da ich nur diesen einen besitze, ist es halt immer derselbe. Nun ist mir aufgefallen, dass er schon dreizehn Jahre alt ist.
Als ich ihn kaufte, war er in Mode. Man nannte so etwas oversized. Überdies war er mir von Anfang an eine Nummer zu gross. Es handelte sich um ein herabgesetztes Einzelstück. Heute komme ich mir darin eher sonderbar vor. Wenn ich Ihnen jedoch die Gehaltskurve meiner letzten zwanzig Jahre hier aufzeichnen würde, würden Sie verstehen, dass ich ihn nicht in erster Linie aus einem Hang zur Exzentrik gekauft habe und trage, sondern vor allem aus ökonomischer Vernunft.
Dass er zu dieser Preisverleihung ein letztes Mal ans Licht der Öffentlichkeit darf, verdankt er meiner Sentimentalität. Die Feier soll eine Art Gnadenbrot für ihn darstellen. Die Ränder an seinen Ärmeln und Hosenbeinen sind eingerissen, den Kragen kriege ich nicht mehr sauber, die Nähte sind mürbe und platzen - er fällt auseinander. Ich bin auf dem Land aufgewachsen. Da gab es Bauern, die zu wichtigen Ereignissen wie Hochzeiten, Beerdigungen oder Taufen in immer demselben Anzug erschienen sind, ihr Leben lang, um darin zuletzt auch noch in ihren eigenen Sarg gelegt zu werden. Was für Stoffe! Was für Nähte! Was für zeitlose Farben und Schnitte! Sie werden nachvollziehen können, mit welchem Respekt einer, der froh ist um alles, dessen Anschaffung er ein für allemal hinter sich bringen kann, an diese Anzüge zurückdenkt und wie sehr er sich nach einem solchen sehnt. In England kann man sich vielleicht heute noch so etwas schneidern lassen. Dort haben sich ein paar alte Traditionen halten können. Beispielsweise gibt es dort noch Schuhmacher, die einem Schuhe fürs Leben anpassen. Ich habe einen königlich britischen Schuhmacher namens Lobb kennen gelernt. Für mich sind Massschuhe aus Pferdeleder der Inbegriff von Luxus. Auf meine Frage, ob er auch Schuhe aus Pferdeleder herstelle, antwortete Mister Lobb: «Sicher, doch ja, wenn Sie es wünschen, selbstverständlich. Doch rate ich in der Regel eher ab von Pferdeleder und empfehle unser englisches Boxcalf. Wissen Sie, wenn Pferdeleder nicht wirklich exzellent gegerbt woren ist, kann es nach fünfzehn, zwanzig Jahren anfangen, in den Knickfalten brüchig zu werden. Das sieht dann aus wie Ränder von Briefmarken. Das wollen wir doch alle lieber nicht - ein Schuh soll schliesslich ein paar Jahre halten, isn't it.» Leider ist mein Englisch sehr bescheiden, weshalb ich Mister Lobb nicht ausdrücken konnte, wie sehr mich seine Antwort begeisterte und überzeugte. Ein Mann, der Schuhe, die nach zwanzig Jahren anfangen zu kränkeln, für schnelllebigen Pfusch hält! Ich versprach ihm, wenn ich jemals zu Geld kommen sollte, mir von ihm ein Paar Boxcalfschuhe herstellen zu lassen.
Zurück zum Anzug: Ich werde ihn heute Abend tragen, und Sie werden mich in dieser schütteren, aus der Mode gefallenen Konfektion vor sich stehen sehen können. Das ist das Kostüm, das ich wähle, um Ihnen einen zeitlos aktuellen Preisträger vorzuführen: Dichter verdienen heute wie vor tausend Jahren wenig Geld. Wenn sie nicht aus wohlhabendem Haus kommen oder dem Lehrerberuf nachgehen, sind sie arme Schlucker. Gönnen Sie ihnen jeden Preis und freuen Sie sich mit mir über diesen hier.
Was die Ehre anbelangt, die mit so einem Preis verbunden ist, rückt sie aus der Sicht des Empfängers, wie Sie sich vorstellen können, ziemlich ins Abseits. Man könnte mich mit dem dreifachen goldenen Shakespearekreuz am seidenen Band, der Sophoklesnadel aus Kristall und der Platinfeder sämtlicher Weltliteratur in einem auszeichnen, ich würde den ganzen Bettel leichten Gewissens schultern und mir über die Verantwortung, die ich damit auf mich lade, kein graues Haar wachsen lassen. Ich brauche das Geld. Den Rest halte ich in Ehren.


Die Preisverleihung Der Grosse Literaturpreis der Stadt Bern wird Matthias Zschokke heute Donnerstag Abend um 19 Uhr im Kornhaus, Forum für Gestaltung und Medien, überreicht.


Matthias Zschokke, geboren 1954 in Bern, seit 1981 als Schriftsteller in Berlin lebend, auf einem Bild von 1988. Den Anzug, den er damals trug, wird er heute Abend bei der Berner Preisverleihung zum letzten Mal tragen.


Der Bund/ Bern, 7.12.2000




Mittelland Zeitung
 
   

«Ich sitze gerne an meinem Tisch und schaue vor mich hin»

Matthias Zschokke: Vom Buch zum Theater und zurück zum Buch – ein Gespräch

Jüngst erschien sein Erzählband «Ein neuer Nachbar» – ein stilles, poetisches Buch, das von der Liebe zum Überflüssigen erzählt. Derzeit hat ihn indes auch das Theater wieder gepackt: Matthias Zschokke ist einer, der sich immer wieder auf neue Wegrouten konzentriert.


Hannes Schmid



Matthias Zschokke, an den Solothurner Literaturtagen 1981 waren Sie als Neuling der Literaturszene dabei. Ein Jahr später schon erhielten Sie den Robert-Walser-Preis der Stadt Biel und des Kantons Bern für den Roman «Max». Ein fulminanter Start in die Literaturwelt.

Matthias Zschokke: Ja, ich erinnere mich. Aber das alles war nicht der «fulminante» Start, wie man das Jahre danach ausdrücken würde. Dieser Lesung in Solothurn folgte vorerst eine monatelange Verlagssuche. Dann dieser Walser-Preis, der für Erstlinge auch in Manuskriptform vergeben wird – damit verbunden viele Hoffnungen. Dann das lange Warten, das sich Gedulden, bis endlich das Buch auf den Markt kam. Für einen jungen Autor ist diese Zeit sehr schwierig und auch belastend. Ich habe nie vergessen, wie lange ein Jahr in einer solchen Situation dauern kann.



Literaturtage sind nicht die stillen Tage, wo das Unaufdringliche die Zeit bestimmt. Es sind meist hektische Tage, wo die Autorinnen und Autoren vor ihre Literatur stehen. Das ist doch eigentlich nicht der Lebensstil des Matthias Zschokke, wie wir ihn aus seinen Romanen und Erzählungen kennen. Warum gehen Sie hin?

Zschokke: In Solothurn fing für mich alles an. Ich habe eine sentimentale Beziehung zu den Literaturtagen. Ausserdem war die Atmosphäre bislang immer sehr gut, eigenartig gut. Wenn ich mich richtig erinnere, sollen in Griechenland sämtliche Zwiste geruht haben während der olympischen Spiele – so irgendwie kommt mir die Stimmung bei den Solothurner Literaturtagen jeweils vor.



Es drängt sich Ihnen immer wieder das Theater oder das Filmemachen vor die Literatur. Eben wurde in St. Gallen eines Ihrer Stücke gespielt. Und zuletzt haben Sie in Genf ein eigenes Stück inszeniert? Hat Sie die Sehnsucht nach Film und Theater und so vielleicht nach mehr Öffentlichkeit gepackt?

Zschokke: Ich muss Miete zahlen, das kennen wir doch alle. Und dann kam aus Genf das Angebot, mein Stück «Die singende Kommissarin» selber zu inszenieren. Das ist doch schön, diese Szenenwechsel in der künstlerischen Arbeit sind auch Herausforderung und Freude. Mit einem Wunsch nach mehr Öffentlichkeit hat das wenig zu tun. Meine Person kann sich hinter einem Drehbuch oder einem Stück, hinter Schauspielern, Bildern oder Musik besser verstecken als hinter einem Buch.



Aber das Theater hat Sie wieder. Immerhin wurden Sie 1989 zum besten Nachwuchstheaterautor gewählt. Und das Filmfestival Locarno, das 1996 mit grossem Erfolg Ihren Film «Erhöhte Waldbrandgefahr» uraufgeführt hat, wartet vielleicht auf den neuen Zschokke.

Zschokke: Weder das deutsche Theater noch Locarno warten. Leider. Ich würde sehr gerne wieder einen Film drehen. Aber die Geldsuche ist mühsam, zeitraubend und irgendwo auch entwürdigend. Es ist, wie wenn man einen Berg besteigen würde. Man versucht den Gipfel – sich selbst – über die Nord-, die Süd- und die Westroute zu erklimmen. Manchmal gelangt man hinauf; aber zu oft bleibt man unterwegs stecken. So versuche ich, auf dem Filmweg, auf dem Theaterweg und auf dem Prosaweg, meinen Klang zu erzeugen. Das ist wie das Erstürmen einer Bastion: Man rennt immer neu, von immer anderen Seiten gegen sie an. Und natürlich ist da immer die Hoffnung, sie endlich einmal zu «erobern». Das ist der Alltag eines Autors.



Es gibt in der Schweiz nicht sehr viele Autoren, die ihre vielseitige Begabung zwischen Literatur, Theater und Film positiv umsetzen können. Ist dieses «mal hier, mal dort» bei Ihnen denn generell mehr Zwang oder ganz einfach Freude?

Zschokke: Freude.



Berlin – niemand wundert sich, dass ein Schweizer Kulturschaffender dort leben und arbeiten will. Aber manchmal, da zieht es Matthias Zschokke doch auch wieder in die Heimat. In der Erzählung «Der Brief an die Genfer» sagen Sie zuerst, es falle Ihnen nichts ein, und dann hat sich doch eine ganz schöne Geschichte entwickelt.

Zschokke: Eine Katze ist eine Katze, in Berlin wie in Bern; oder eine Akazie. Sie wird sich vielleicht ein wenig mehr in diese oder in jene Richtung entwickeln, je nach dem, wo sie lebt. Allzu gross sind die Veränderungen aber kaum. Und so ergeht es doch auch uns Menschen, nicht wahr? Ich bin Matthias Zschokke, in Aarau, Ankara wie in Arkansas.

Also werden Sie auch weiterhin ein Aargauer, ein Berner und Berliner sein?

Zschokke: Ja.



Und in welche künstlerische Richtung weist der Weg der nächsten Monate?

Zschokke: Im Moment freue ich mich wieder aufs Schreiben. Ich sitze sehr gerne an meinem Tisch und schaue vor mich hin.

"Mittelland Zeitung", Solothurn, 6.5.2oo2






Entretien avec Matthias Zschokke par Beatrice von Matt

- Matthias Zschokke, on éprouve une certaine appréhension lorsqu'il s'agit de vous poser des questions directes. Chaque phrase que vous écrivez se défend au fond contre toute tentative de fixer les choses. Mais je vais essayer quand même. Pourquoi vivez-vous à Berlin depuis plus de vingt ans maintenant? Que représente cette ville pour vous? Comment réagissez-vous aux transformations qu'elle a subies, au Reichstag par exemple en tant que "siège ressuscité du gouvernement"?

- Berlin, le Reichstag… Je ne crois pas que ce sont là des choses dont il vaille la peine de parler. Aujourd'hui, ils sont ainsi, et demain, ils seront autres. Je préfère les choses qui restent et se ressemblent, celles que l'on peut comprendre où que l'on se trouve. Berlin donc, mais là où elle ressemble aux autres villes. Mon installation à Berlin est due à des hasards, à l'argent aussi. Et puis, il faut bien vivre quelque part. À Berlin, on trouvait des appartements bon marché avant la chute du Mur. Ce n'est plus le cas aujourd'hui.

- Si vous deviez vivre en Suisse, quelle ville choisiriez-vous? Vous intéressez-vous à la Suisse et à ses problèmes actuels?

- En Suisse, il fait bon vivre partout. Il n'y a pas cette grande disparité entre la ville et la campagne. On est relié à tout partout, comme sur Internet, on est en réseau avec tout. Si j'étais libre de choisir, je m'installerais dans une région dont je ne comprends pas la langue, au Tessin ou en Suisse romande. J'en ai vite assez quand il faut toujours avaler jusqu'à la dernière nuance toute cette soupe de mots que l'on cuisine jour après jour autour de moi. Si elle ne me parvient que comme un vague murmure, ça me suffit amplement.

- Est-ce important pour vous de vous trouver dans un certain environnement? Comment un auteur trouve-t-il sa matière première?

- Je suis assez peu fasciné par une vue touristique sur la vie. Lorsque je lis dans un roman que des dauphins sautent devant la fenêtre ou que l'on brûle des veuves, je me dis juste "ouh là"! Ce n'est que lorsque l'auteur tente de m'apprendre à quoi ressemble l'odeur de la chair brûlée ou les museaux de dauphin lorsqu'on les touche que ça éveille mon attention. L'écriture horizontale ne me dit rien, il n'y a que l'écriture verticale qui me parle. Mais pour pouvoir creuser en profondeur, on doit très bien connaître les choses. Après vingt ans de vie dans le même appartement, je découvre par exemple des détails du vieux platane se trouvant devant ma fenêtre que je n'avais jamais remarqués jusqu'alors, mais qui, depuis que je les connais, me plaisent infiniment et me paraissent essentiels. Dans ces moments-là, je crains parfois de rester un éternel touriste. La dernière tempête a d'ailleurs abattu la moitié du platane en question. C'est triste.

- Durant les mois à venir, vous allez séjourner à Budapest en tant qu'hôte du "Collegium Budapest". Qu'attendez-vous de ce séjour?

- J'attends de trouver des impressions qui soient encore plus les mêmes que celles de Berlin ou d'ailleurs. C'est ce qui est bien quand on voyage, c'est qu'on a une vision plus précise de soi-même et de sa propre ville. Mais qui sait, peut-être vais-je vivre quelque chose de nouveau et peut-être parlerai-je enfin dans mes livres d'autre chose que de moi dans le quartier berlinois du Wedding, peut-être écrirai-je sur moi rêvant de retrouver le Wedding… Il existe un proverbe chez les Kikuyus du Kenya (je l'ai saisi au vol quelque part) qui dit: "Sortir de sa maison, c'est apprendre."

- Vos personnages observent souvent leur propre corps. "Les corps réels ne sont pas beaux en général, ils l'ont seulement été", dit par exemple Ellen dans votre roman Bonheur flottant. "Il est devenu gras avec les années", dit-on du "Chanteur pleureur"… Et même la belle Béa, dans votre premier roman Max, a soudain l'air un peu plus vieille… Quel regard portez-vous sur les différents âges de la vie, sur le fait que nous sommes de passage, sur la dégradation? Le temps qui passe est-il pour vous un cauchemar?

- Mais, la vie tout entière est un … Ce que j'écris m'est supportable. Si ça m'était insupportable, je n'aurais pas pu l'écrire. Je m'applique naturellement à trouver supportable le plus grand nombre de choses possible dans la vie. J'y parviens en consignant par écrit le plus de choses possibles avec la plus grande exactitude possible. Plus je parviens à être précis et complet dans cette tâche, plus je désarme le cauchemar.

- "Max est un esthète": c'est ainsi que vous caractérisez votre premier personnage de roman. Que représente pour vous la beauté? Est-elle aussi suspecte à vos yeux? Justement parce qu'elle est éphémère et vulnérable?

- Puisque nous avons parlé de Berlin: Dieu sait si cette ville est loin d'être une beauté… Souvent, je trouve ça reposant, quand quelque chose n'est pas très beau (dans le sens courant). Mais ce sont des philosophies entières que vous avez enveloppées dans votre question… Je n'ai pas la moindre idée de ce que c'est que la beauté. Elle est tout aussi insupportable que son contraire si l'on y est soumis trop souvent. Oui, c'est comme pour tout: plus elle est rare, plus elle est émouvante.

- Vous semblez avoir une préférence pour la splendeur passée, par exemple pour les hôtels chics d'autrefois… Se pourrait-il que vous y lisiez le temps qui passe, tout comme sur les paysages de corps en ruines? Pourquoi avez-vous choisi, 1996, le vieux Grand Hôtel Giessbach comme décor pour votre film "Erhöhte Waldbrandgefahr"?

- En ce qui concerne le Giessbach, je l'ai choisi avant tout pour des raisons pragmatiques. Premièrement, si j'en avais les moyens, je préférerais fondamentalement tourner mes films en studio. Les hôtels offrent quelque chose comme un refuge pour ceux que l'on a chassé des studios. Dans les vieux Grand Hôtels, on trouve généralement de grandes pièces, ce qui est un atout pour le tournage. Et surtout: les vieux murs, les vieux meubles racontent quelque chose. Lorsque je montre une chambre dans mon film, si les murs et les meubles sont neufs, je dois d'abord leur faire subir un traitement long et coûteux avant qu'ils ne racontent ce que je veux voir. Les vieux murs, eux, racontent leurs propres histoires et ne me coûtent rien, je dois seulement les accepter. En plus, après quinze ans de vie à Berlin, le Giessbach était tout simplement d'une somptueuse beauté.

- Vos personnages, dans le roman "Bonheur flottant" par exemple, aiment à raconter des histoires bizarres. Comment faites-vous pour dénicher des histoires pareilles? Prêtez-vous attention à ce que les gens racontent? Ou ne cherchez-vous pas tant à raconter des histoires qu'à créer des personnages qui en racontent? Sont-ce eux qui vous importent avant tout, ces personnages qui racontent avec toute l'énergie du désespoir?

- J'aime écouter et regarder autour de moi. Parfois, je me rends compte, après coup, que ce que j'ai vu ou entendu constituait une histoire. Alors, je la mets par écrit. Moi-même, j'invente assez peu. Je dirais même que je dois lire d'abord comment il pleut quelque part avant de réaliser que je me trouve justement sous la pluie et que je suis en train de me faire mouiller. Si personne ne me raconte ce que je ressens, en général, je ne l'ai pas ressenti. S'asseoir une fois quelque part pour de bon, sentir la chaise, entendre les moineaux, voir les nuages, mais vraiment, vivre dans le moment, ça c'est un événement, ça c'est la vie, c'est ce que la plupart d'entre nous font sans doute le moins bien. Oui, ce sont les personnages qui m'importent avant tout. Ils ont beaucoup à voir avec moi. Ils sont mes favoris. Ou pour être plus précis, ils sont comme je souhaiterais voir mes favoris. Au fond, ils sont comme je voudrais être moi-même.

- Vous semblez avoir un faible pour la mélancolie. Chez vos personnages, celui qui ne cherche pas à se cacher sa propre mélancolie a droit, au minimum, à votre respect. Cette tendance à la mélancolie découle-t-elle de votre philosophie de vie? De votre conscience du fait que tout s'en va?

- Vous parlez de mélancolie. Je ne sais pas… C'est vrai que je ne me sens pas très à l'aise au milieu des gens actifs, entreprenants et sûrs d'eux-mêmes. Personnellement, je préfère les bougons. Les gens qui regardent dans le vide, qui ne savent pas quoi dire, qui geignent et qui soupirent; ceux-là m'inspirent confiance. Les personnes hautement motivées, qui sont sans cesse en représentation et qui ont appris aux cours de management comment dégager quelque chose de positif me font peur. Je crains toujours de découvrir le gouffre derrière eux, noir et profond, celui que nous craignons tous tellement, face auquel l'épouvante, la vraie, s'empare de nous et dans lequel nous sautons alors sans réfléchir.

- Vos phrases ont un rythme très souple comme on le trouve rarement dans les textes en prose. Est-ce là le fruit d'un long travail? Ou êtes-vous un genre de danseur de rêve lorsque vous écrivez? Tout cela vous vient-il spontanément? Comment travaillez-vous? A un rythme régulier?

- Je me rends à heure fixe à mon bureau, puis le soir, je rentre chez moi. Lorsqu'il m'arrive de ne pas y aller un jour, j'ai mauvaise conscience. Parce que je suis secrètement marqué par des craintes protestantes du genre: on n'a rien sans rien. Ce sont des bêtises, évidemment. Avec ma façon d'écrire, on gagne un salaire de misère; plus j'investis dans un texte, moins il me rapporte. Pour simplifier les choses, j'essaie de me convaincre quand même que c'est avec le travail que j'accomplis à ma table que je gagne ma vie; alors, le fait de me rendre chaque jour à mon bureau a un sens. Mais en vérité, travailler dans le domaine de la littérature reste un luxe. Je pourrais tout aussi bien travailler à la mi-journée. Bon, j'aurais naturellement beaucoup plus de temps libre pour dépenser de l'argent que je n'ai pas, cela me rendrait certainement doublement malheureux.

- Vous êtes aussi connu en tant que dramaturge. Où se situe pour vous la différence entre l'écriture théâtrale et l'écriture en prose?

- Bah… On essaie de trouver un ton qui nous soit propre, de donner une forme à sa propre vision des choses, et ceci de toutes les façons possibles et imaginables, par le biais du roman, du poème, du film et du théâtre. En tant que non-académicien, je ne dispose pas d'une dramaturgie ou d'une poétique. Je ne m'en suis pas non plus bricolé une à moi. J'écris ce que je pense être juste. Par exemple des pièces magnifiques qui n'ont toujours pas été montées et des films tout aussi magnifiques qui n'ont toujours pas été tournés.

- Comment jugez-vous le théâtre contemporain de langue allemande, à Berlin et ailleurs? Vous avez mis en scène récemment une de vos pièces à Genève. Comment avez-vous perçu le public là-bas?

- Au théâtre et au cinéma, ce qu'on demande en ce moment, ce ne sont pas des pièces et des films magnifiques, mais du pathos branché. On comprendra sans peine que dans l'ensemble, je ne pense pas grand'chose du théâtre et du cinéma du moment. A Genève, les choses n'en sont pas encore là; mais je crains que ce ne soit pas forcément dû à un renoncement conscient à tout ce toc. Au contraire, on s'y est demandé sérieusement et à plusieurs reprises si, pour ce qui est du théâtre, on ne vivait pas sur une autre planète. Comme si le théâtre et le cinéma étaient des affaires de mode! Ils sont bien trop dommages pour ça.

- Dans votre recueil "Ein neuer Nachbar", vous dites pourquoi vous aimez lire Robert Walser. Vous y écrivez que Walser n'est souvent pas compris, ni en Allemagne, ni en Suisse, même si les raisons de cette incompréhension ne sont pas les mêmes partout. Avez-vous aussi le sentiment, pour vous-mêmes, qu'avec vos livres, vos pièces, vos films, vous êtes "un véritable piège, une source de malentendus"?

- Je ne peux pas me plaindre d'être mal compris. On ne devient un incompris qu'à partir d'un certain degré de notoriété. Par contre, bien des choses de moi n'ont même pas encore réussi à se frayer un chemin jusqu'au public. Mon roman Der dicke Dichter par exemple avait déjà disparu du marché bien avant qu'on ne l'ait véritablement remarqué. Ou ma pièce, Die Exzentrischen: un jour, elle aura été l'une des pièces essentielles de notre époque, sans qu'elle soit parvenue, en son temps, ne serait-ce qu'à se hisser sur une scène. C'est agaçant, évidemment, mais je m'en réjouis secrètement. L'agitation de la vie culturelle ne peut pas vraiment promouvoir les œuvres. Ça leur fait plus de bien de prendre racine et de pouvoir se fixer en paix.

- Voudriez-vous ajouter quelque chose? Ai-je raté quelque chose que j'aurais dû vous demander?

- Oui, j'aurais encore un post-scriptum, au sujet de Berlin. Quelque chose que j'oublie toujours de mentionner. Une des raisons pour lesquelles je vis à Berlin, c'est que je dispose ici d'une chambre à coucher pratiquement exempte de moustiques. De temps à autre seulement, quand les nuits d'été se font particulièrement lourdes, il arrive qu'un élément isolé s'égare dans ma chambre, un élément que la plupart du temps, je repère et j'écrase déjà le lendemain matin, après quoi je peux vivre à nouveau en paix. C'est merveilleux. Sur d'autres plans aussi d'ailleurs, cette ville continue à être incroyablement vide par rapport à d'autres. Une ville morte carrément. On a souvent l'impression de déambuler dans des ruines, comme en Amérique du Sud peut-être, dans ces villes inca abandonnées. Ça me plaît. Les choses n'ont guère changé au cours des vingt dernières années. Certes, il y a aujourd'hui de petits tourbillons ici ou là, des centres, de la vie, comme on dit. Mais globalement, il y règne toujours une ambiance mort vivante; comme si l'on avait assommé la ville peu de temps auparavant et qu'elle commençait seulement à reprendre ses esprits. Elle dégage quelque chose de légèrement sonné, c'est un peu comme si elle avait la gueule de bois…


"Feuxcroises", Lausanne, Nr.5/ 2oo3



Aargauer Zeitung / MLZ; 30.06.2006

Kultur Zeitung

Anregen zum Selber-Denken

matthias zschokke Der Solothurner Literaturpreisträger 2006 über Berlin und die Schweiz, den Abstand zu Pyramiden und sein Flair für Theater und Film

roland erne

Matthias Zschokke, derzeit werden Sie gleich mehrfach ausgezeichnet: mit dem Solothurner Literaturpreis für Ihr Gesamtwerk, mit dem Berner Buchpreis und dem Schillerpreis für Ihren jüngsten Roman «Maurice mit Huhn». Was gönnen Sie sich nach diesem Preissegen?

Matthias Zschokke: Normalerweise passiert nicht viel auf meinem Konto. Mit dem Geld werden die diversen Löcher gestopft, die in der Dürrezeit entstanden sind. Den Rest holt sich das Finanzamt. Preise zählen ganz normal als Einkommen. Es ist weniger romantisch, als es klingt.

Wie war das, als Sie sich vor über 25 Jahren dem Schreiben zuwandten, auch in Sachen Förderung und Unterstützung?

Zschokke: Damals waren die Lebenshaltungskosten sehr viel niedriger. Insbesondere in Berlin, wo alles subventioniert wurde - man fürchtete, sonst würden die Einwohner abwandern und man müsse die eingemauerte Stadt aufgeben. Da war es verhältnismässig einfach, sich als freischaffender Autor durchzuschlagen. Nur als Beispiel: Meine Wohnung kostete hundertzwanzig Franken. Mit dem Walserpreis von zwanzigtausend Franken, den ich 1981 erhielt, konnte ich mir ein ganzes Jahr finanzieren. Heute kostet meine Wohnung tausendzweihundert . . . Das ist aber ein allgemeines Problem: Seit die freie Marktwirtschaft ungebremst wütet, wird vielen die Luft knapp.

Seit 1980 leben Sie in Berlin. Weiterhin ein lohnender Ort zum Bleiben und Schreiben?

Zschokke: Natürlich geht es nicht nur darum, dass man sich das Leben hier früher eher leisten konnte als woanders. Es ging immer auch ums kulturelle Umfeld. Das ist heute eher reichhaltiger als damals. In einem Land, in dem ich die Sprache nicht verstehe, fühle ich mich bald verloren. Da hilft dann auch keine billige Miete.

Die Schweiz kommt bei Ihnen nicht allzu gut weg: In Ihrer «Dienerbewerbung» ist die Rede von einem in sattem, warmem Überfluss dämmernden Land voller Feiglinge, die sich nicht trauen, glücklich zu sein. Eine Rückkehr ins Mittelland, wo Sie aufwuchsen, ist dennoch nicht auszuschliessen?

Zschokke: Ich kenne keinen vernünftigen Schweizer, der seine Heimat allen Ernstes infrage stellen würde. Insgeheim habe ich geradezu den Narren gefressen an der Schweiz. Doch zurückkehren? - Verführen Sie mich nicht schon wieder dazu, vom leidigen Geld anzufangen.

Nichts sei höher einzuschätzen als jemand, der seine Träume bewahrt, haben Sie 2002 in einem im Band «Ein neuer Nachbar» abgedruckten Essay festgehalten. Warum denn?

Zschokke: Keine Ahnung. Ich bin kein Theoretiker, könnte mir jedoch vorstellen, dass Träume ein zusätzliches Potenzial in die Welt bringen und sie dadurch reicher machen. Vielleicht so?

Dort findet sich auch die schon 1987 geäusserte Überzeugung, wonach Literatur mit dem Leben wenig zu tun habe. Weil Sie eben mehr dem Traumhaften verpflichtet ist?

Zschokke: Ich mag Literatur nicht, wenn sie allzu konkret Stellung bezieht zum Leben. Sie soll nicht eins zu eins brauchbar und anwendbar sein. Sie soll anregen zum Selber-Denken und zum Selber-Fühlen. Nach der Lektüre eines Buchs sollen die Leser nicht wissen, wie es im Leben weiterzugehen hat. Im Gegenteil. Sie sollen es weniger gut wissen als vorher.

Ihre Figuren verraten einen Hang zum absichtslosen Dasein und anfälligen Müssiggang in gar hektischer Umgebung. Ist das ein Bekenntnis zur Langsamkeit, die unserer Zeit abhanden gekommen ist?

Zschokke: Ich bin langsam. Mir fällt immer erst morgen ein, was ich gestern hätte tun und sagen sollen. Das ist eher unangenehm, dieses Hinterherlaufen. Aber ich kanns nicht ändern. Ich propagiere nicht die Langsamkeit, ich bin langsam.

Die Literaturkritik attestiert Ihnen eine geschärfte Aufmerksamkeit für «Winzigkeiten», wie es in Ihren «Hinterlassenschaften» heisst. Warum hat sich diese Beschäftigung mit dem gemeinhin vernachlässigbaren Alltag bei Ihnen immer wieder aufgedrängt?

Zschokke: Rundherum gibt es ein tolles Leben, hat man - vor allem in der Literatur - oft den Eindruck. Wenn ich dagegen mein eigenes anschaue, kommt es mir nichtssagend vor. Das kann ich nicht ändern: Die anderen entdecken offenbar dauernd Pyramiden, während ich von morgens bis abends nichts als Nettelbeckplatz zu sehen bekomme. Ist mein Leben deswegen vernachlässigbar? Das glaube ich nicht. Wahrscheinlich ist es eine Trotzreaktion: Ich schaue mir halt den Nettelbeckplatz an, wenn es mich schon mal dahin verschlagen hat. Ich werde geradezu bockig, wenn man mich dazu verführen will, endlich die Pyramiden zu besuchen.

Wie muss man sich das vorstellen: Sammeln Sie zunächst Aufzeichnungen Ihrer Beobachtungen? Oder anders gefragt: Wie vollzieht sich der Schreibprozess?

Zschokke: «Maurice» ist langsam entstanden. Immer wieder durchgekaut, hinzugefügt, rausgenommen. Da ja die Geschichte, die erzählt wird, nicht besonders dramatisch ist, mit Höhepunkten etc., war die Aufgabe: Wie schaffe ich es, eben zum Beispiel den Nettelbeckplatz anstelle der Pyramiden so zu erzählen, dass ich dabei nicht einschlafe, sondern neugierig bleibe und mich gut unterhalte? Das erforderte eher musikalische oder malerische Überlegungen.

In «Warum ich Robert Walser mag» taxieren Sie sein Schreiben als Ringen, «vor sich selbst zu bestehen, sich selbst zu genügen - um den Moment auszuhalten und nicht in den Sekunden unterzugehen». Inwiefern gilt das auch für Sie?

Zschokke: Das gilt für jeden Künstler.

Schriftsteller liessen sich «immer wieder ins Tagesgewäsch hineinziehen» und zu «krausen Stellungnahmen» verleiten, ist bei Ihnen nachzulesen. Wie einfach oder aber schwierig ist es, sich da herauszuhalten?

Zschokke: Das ist nicht allzu schwierig, solange man wenig gefragt ist. Erst wenn einer eine gewisse Berühmtheit erlangt hat, wird er - insbesondere in Deutschland - zu jedem Blödsinn befragt. Zu Fussball, zu Politik, zu Gentechnologie. Fürchterlich. Egal, ob er seine Berühmtheit durch Fussball, Tanz oder Philosophie erlangt hat: Hat er sie, wird er gefragt und soll seinen Senf zu jedem Würstchen des Tages abgeben. Nimmt er die Fragen ernst und sagt wirklich mal etwas, so wie zum Beispiel Handke oder Strauss, dann wird ihm das Gesagte auch noch übel genommen. Eine Pest. Natürlich denken alle zu allem immer irgendetwas, das ist normal. Doch warum soll sich jemand dafür interessieren, was ein Tennisspieler oder ich zur Asylantenfrage meint oder zum Schweizer Aussenverteidiger?

Als ausgebildeter und danach bei Peter Zadek in Bochum geschulter Schauspieler haben Sie auch Stücke geschrieben, zuletzt «Die singende Kommissarin». Warum ist es seit dieser Berliner Uraufführung im Jahre 2002 um den Theaterautor Zschokke eher still geblieben?

Zschokke: Es gibt ein weiteres Stück nach der «Kommissarin»: «Raghadan» (2005, bisher unaufgeführt; Red.). Und eines wird am 26. September in Genf uraufgeführt, auf Französisch: «L’invitation» (zurückgehend auf «Die Einladung» von 2000, Red.). Warum es im deutschsprachigen Theater still geworden ist um mich, müssen sie dort fragen. Mir ist es unerklärlich. Ich mag Theater nach wie vor sehr und glaube, dass meine Stücke eines Tages noch viel Freude machen werden. Das Gleiche gilt für den Film. Auch ihn liebe ich.

Gibt es nach Ihren ersten drei Filmen ein neues Projekt, das sich auch realisieren lässt?

Zschokke: Momentan versuche ich, wieder eines auf die Beine zu bekommen. Leider kostet Film viel Geld, und man meint, so ein Unternehmen müsse sich wirtschaftlich rechnen. Das verstehe ich natürlich, nur ist es ja so, dass sich oft verrechnet, wer zu viel rechnet.

Welcher Prosastoff wird Sie nach dem Roman «Maurice mit Huhn» beschäftigen?

Zschokke: Eine möglichst einfache Geschichte möchte ich erzählen, von einem Mann und einer Frau, die zu den Pyramiden fahren und dort - so wie ich mich kenne - wohl den Nettelbeckplatz finden werden.

Obligate Schlussfrage: Was bedeutet der Solothurner Literaturpreis für Sie?

Zschokke: Eine Chance. Ich gerate dadurch kurz ins Scheinwerferlicht und kann versuchen, auf «Maurice» aufmerksam zu machen. Vielleicht fasst der eine oder andere Vertrauen und kauft das Buch. Das wäre der grösste Erfolg. Wenn es dem Käufer dann sogar noch gefällt, wäre ein Leser gewonnen für die Zukunft. Davon träumt jeder Schriftsteller. Sonst? So ein Preis schmeichelt natürlich wie ein Dr. h. c. Je hochkarätiger die Preisträgerliste ist, desto mehr ehrt es den neu hinzugekommenen. In Solothurn ist die Liste exquisit.

Preisübergabe 3. Juli. 19.30 Uhr im Konzertsaal Solothurn.

 





Sprachlos in New York

Der langsamste Schriftsteller der Schweiz, Matthias Zschokke, war Gastautor in der Stadt, die niemals schläft

Von Roman Elsener

Der Sonntagmorgen gehört im Big Apple eigentlich dem New Yorker und der New Yorkerin ganz allein. Das hektische Treiben der Woche bleibt draussen vor der Tür, man räkelt sich länger im Bett, wälzt sich durch die zweieinhalb Kilo schwere Wochenendausgabe der «New York Times» oder hält ausgedehnten Brunch mit Freunden.

Und doch war der Besucherandrang an jenem Sonntag im Deutschen Haus am Washington Square Park so gross, dass zusätzliche Stühle herbeigeschafft werden mussten. Auf dem Programm stand eine Matinee im «Krautgarden», einem Forum für junge deutsche Literatur. In diesem Rahmen fand auch der in Berlin lebende Schweizer Schriftsteller Matthias Zschokke Platz, der seit Januar als Gastautor des Deutschen Hauses in New York weilte.

Aus dem Tritt

Neben Zschokke lasen der verschmitzt-freche Claudius Niessen und der Dichter Carl-Christian Elze, dessen kryptische Gedichte den New Yorkern aber kaum den Schlaf aus den Augen zu treiben vermochten. Sonntagmorgen in NY: Matthias Zschokke liest vor Zschokke gelang dies auf Anhieb. In seinem Universum rennt Zeit nicht, sie schlendert. Unter seiner Lupe sehen Dinge oft ganz anders aus als auf den ersten Blick. Hinterfragt Zschokke vor dem deutschkundigen Publikum in New York den Text einer Packungsbeilage eines einfachen Desinfizierungsmittels, entspringt daraus köstliche Komik, oft aber verbunden mit einer Spur dessen, was die Amerikaner «Angst» nennen – einen leisen Zweifel am guten Willen der Menschen, gepaart mit der verzweifelten Lust, zu sehen, wie mit einem falschen Schritt der Weltenlauf aus dem Gang gebracht, die Realität ad absurdum geführt werden kann. «In einer Zeit in der jeder ausschliesslich an seiner Brauchbarkeit, Verstehbarkeit, Verkaufbarkeit gemessen wird, in so einer Zeit unbrauchbar, unverstehbar, unverkäuflich zu sein, halte ich für eine lebensnotwendige Aufgabe», sagt der Autor in einem Soundclip auf dem Internet.

Schon als Zschokke 1982 mit «Max» in der Literaturszene einschlug, schrieb er gegen den Strom der Zeit und war kaum einzuordnen: In seinem Buch passierte nichts, keine klassische dramatische Kurve, keine Läuterung des Helden – und doch wuchs dem Leser der langweilige Max ans Herz, das Buch war kaum aus der Hand zu legen. Auch in den folgenden Werken zelebrierte Zschokke die Unberechenbarkeit, den Stilbruch, die Ablehnung aller Klischees und Formen: «Prinz Hans» war schon kaum mehr greifbar als Charakter, «ErSieEs» verlor sogar das Geschlecht – aber Zschokkes Stimme wuchs, seine Gabe für genaue Beobachtungen ist unverkennbar.

In der Folge – sein Werk umfasst bisher acht Bücher, acht Theaterstücke und drei Filme – blieb der 52-jährige Berner seinem mit allen Konventionen brechenden Stil treu, hie und da mischte sich nun ein Hang zu Melancholie und Ironie in die Texte und Bilder. Bei seinem Regieerstling, «Edvige Scimitt» lernte der Autor seine Lebenspartnerin kennen, die vife deutsche Schauspielerin Ingrid Kaiser. Sie war es auch, die den zurückhaltenden Schriftsteller nun, 20 Jahre später, dazu bewegen konnte, für zehn Wochen in die Bleecker Towers nach New York zu ziehen und das Angebot des Deutschen Hauses anzunehmen, als Writer-in-Residence die Stadt zu erforschen.

Kein Angeber

Zschokke ist kein Angeber, keiner, der sich – trotz bestem Aussehen und sympathischem, jung gebliebenem Gesicht – gerne den Massen zum Frass vorwirft. Sie verwirren den scheuen Mann, der es gerne geordnet und gediegen mag, lieber beobachten seine wachen Augen still das Treiben. Auf eine erste Anfrage des St. Galler Tagblatts für ein Interview reagiert der Autor mit der auch für sein Werk typischen «Verweigerung als Stil». Der «sanfte Rebell» – so der Titel eines Buches über Zschokke – freut sich riesig über das Angebot, lehnt dann aber dankend ab: «Ihre Mail ist so herzerfrischend, dass ich mit fliegenden Fahnen zu einem Interview kommen möchte. Doch leider weiss ich schon auf die erste Frage keine Antwort: Wo treffen?», schreibt Zschokke per E-Mail, und weiter: «Hätten wir uns auf einen Treffpunkt geeinigt, wüsste ich zu keinem der vorgeschlagenen Themen etwas zu sagen. Eindrücke von New York? – viel mehr als ein dummes Wow käme mir nicht über die Lippen. Im Vergleich zu Berlin, zur Schweiz – ? Englisch kann ich nicht . . . Im Ernst: Es fällt mir nichts ein. Ich bin hin und weg, es verschlägt mir die Sprache. Deswegen muss ich leider auf das Interview verzichten.»

Charmant untertreiben

Doch so geht es den meisten Touristen, die zum ersten Mal nach Manhattan kommen: Der riesige Moloch überwältigt sie, sie drohen im kulturellen Schmelztiegel zu verbrutzeln. Wie geht der Autor mit den zahllosen Eindrücken um? Man meine, Amerika aus Medien, Filmen und Büchern zu kennen, und doch finde man sich in einer anderen Kultur, erzählt er im Deutschen Haus. Alles sei hier zwar nur ein wenig verschoben von den Vorstellungen, wo aber viel ein wenig abweiche, sei plötzlich alles anders.

«Ich stand die ersten Wochen in aller Früh auf, scharrte in den Startlöchern und konnte es kaum aushalten, bis ich endlich hinausgehen konnte in die Stadt, auf Erkundungstour. Dann stand ich endlich unten vor meinem Wohnhaus, der eiskalte Wind pfiff mir um die Ohren, ich wusste vor lauter Möglichkeiten nicht, will ich vorwärts, rückwärts, links, rechts, und weil mir die Ohren drohten abzufrieren, ging ich geradeaus über die Strasse ins italienische Café, wo ich mich aufwärmte und eines der wunderbaren Dolce ass, die dort hergestellt werden, echter als in Italien», schreibt Zschokke weiter in seiner E-Mail.

So sei er in New York vornehmlich dicker geworden, gehe wieder und wieder los, mit offenem Mund, und sehe fast gar nichts. Was bei einem, der laut dem «Spiegel» ein «durchtriebener Kannitverstan» und laut anderen Rezensenten ein Schreiber «mit dem mikrokosmischen Blick eines Robert Walsers» ist, natürlich charmant untertrieben ist – die Stadt hat ihn gepackt, und dick ist er keineswegs. Dass New York in Zukunft in sein Schreiben einfliessen wird, sei fast unvermeidbar: Bekanntlich könne ein Autor nichts schreiben, in dem nicht auch ein Teil seiner selbst sei. Er hofft «auf eine gewisse Beschleunigung im Schreibstil», zu der die 24-Stunden-Stadt anrege. Es liegt Zschokke aber fern, wie junge Popliteraten mit New York zu prahlen – zum einen ist er sich übermächtiger NY-Werke wie Max Frischs «Montauk» oder Jürg Federspiels «Typhoid Mary» gewahr, zum anderen sei oft nur schon das «Namedropping» heikel, gar fatal. Er jedenfalls gehe auf Abstand, wenn jemand gross mit New York auf der Titelseite komme.

Kurz vor seiner Abreise aus der pulsierenden Metropole meldet sich Zschokke noch einmal per E-Mail: «Ich bin am Ertrinken!», eröffnet er, «ich habe noch nicht einmal einen Zipfel der Stadt gesehen. Werde wohl zurückkehren als einer aus Bichsels Geschichte <Amerika gibt es nicht>, der in Europa erzählt, wie toll diese Stadt ist (denn das ist sie wirklich), die es gar nicht gibt.» Und schon will man mehr hören.


"St. Galler Tagblatt", 17.4.2oo7






Die ewige Heiterkeit

Der Schweizer Autor und Wahlberliner Matthias Zschokke
geht «Auf Reisen» und liest diese Woche in Basel

 

SUSANN SITZLER, Berlin

 

 

Seit fast dreissig Jahren lebt

Matthias Zschokke in Berlin, doch

jetzt geht er manchmal auf Reisen,

wie seine neue Erzählung verspricht.

Eine Begegnung mit dem

Berner Schriftsteller, Dramatiker

und Filmemacher.

 

Matthias Zschokke kennt das

«Brel» nicht. Dabei ist das Lokal am

Berliner Savignyplatz wie gemacht

für den Schweizer Schriftsteller,

Dramatiker und Filmemacher:

Sobald man den Raum betritt, scheint

keine Uhr mehr zu ticken. Die Tische

sind in zwangloser Eleganz weiss gedeckt.

Keinem Gast käme es in den

Sinn, in ein Handy zu krakeelen. Das

Restaurant liegt in Berlin-Charlottenburg,

dem Zentrum einer Stadt,

die West-Berlin hiess, als Matthias

Zschokke 1980 hierher zog. Sie hat

sich seither radikal gewandelt, auch

am Savignyplatz. Zschokke selbst

aber, inzwischen 54 Jahre alt, umgibt

eine rätselhafte Aura der Zeitlosigkeit.

Gerade ist seine neue Erzählung

«Auf Reisen» erschienen.

ARBEITSLOS. Entstanden ist das

Buch, wie die meisten seiner Werke,

an Zschokkes wunderlichem Arbeitsplatz:

einer weitläufigen, kargen Fabriketage

im Bezirk Wedding, dem

schäbigen Norden der Stadt. Von

Anfang an teilt er sie sich mit einem

Maler, ein Telefon gibt es bis heute

nicht. Diesem Büro ist der Berner

ebenso treu geblieben wie seiner

Wohnung in der Nähe des Bahnhof

Zoo. Nach Berlin kam der gelernte

Schauspieler zufällig: «Meine Freundin

und ich waren arbeitslos und die

Stadt war damals schön billig.» Bald

wandte er sich von der Bühne ab und

dem Schreiben zu. Seither erschien

alle paar Jahre ein Buch, ein Stück

oder ein Film. Die Medien berichteten

immer treu, und hin und wieder

bekam Zschokke einen Preis oder ein

Stipendium.

TROSTLOS. Er liess sich durch die

Gegenwart treiben, möglichst unberührt

von Erfolg oder Misserfolg. Die

oft trostlose Weitläufigkeit Berlins

lernte er schnell zu lieben. Die Stadt

ist gross und leer genug, dass in ihr

fast alles möglich scheint. Jeden Tag

kann man das Haus verlassen und

sich vornehmen, heute mit einem

ganz neuen Leben zu beginnen, ohne

es je tun zu müssen. Bald sprach er

lieber Hoch- als Berndeutsch. Nur an

düsteren Tagen war er ein wenig unfroh

darüber, dass jüngere, viel weniger

sorgfältige Autoren grössere

Beachtung im schnell rotierenden

Markt bekamen. Dass es überhaupt

immer mehr um den Autor geht und

nicht um die Literatur. An guten Tagen

nahm er diese Entwicklung mit

Heiterkeit hin. Schliesslich wollte er

vom Geschrei des ausgehenden

20. Jahrhunderts gar nicht belästigt

werden. Und erst recht wollte er

nicht mitdröhnen.

Lautstärke ist kein Wert in Matthias

Zschokkes Universum. Seine

Kraft liegt im leisen Witz, in der Genauigkeit

der Beobachtung und in

einem Sinn für Schönheit und Harmonie.

Zschokkes Hemd hat genau

die Farbe seiner Augen, ein graues

Grün. Es käme einem nicht in den

Sinn, Eitelkeit darin zu sehen.

GRANDIOS. 2006 stand Zschokkes

neuer Roman «Maurice mit Huhn»

plötzlich in den Bestseller-Regalen

der Schweizer Buchhandlungen. Die

Zeitungen überschlugen sich vor Begeisterung.

Der Schriftsteller bekam

in kurzer Folge den Solothurner Literaturpreis

und den Schillerpreis. Hat

ihn das aus der Ruhe gebracht? «Ich

werde zu mehr Lesungen eingeladen.

Vor jeder Lesung überlege ich,

was ich den Leuten zur Begrüssung

sagen könnte. Etwas, das ihre Erwartungen

erfüllt und ihnen zusagt. Ich

formuliere und formuliere und es

wird immer komplizierter. Am

Schluss finde ich dann endlich eine

Formel, an der nicht so viel Überflüssiges

und Übertriebenes hängt. Aber

sie heisst dann immer nur ‹Guten

Abend›.» Es kommt nicht von ungefähr,

dass Zschokkes literarische

Karriere 1981 mit dem Robert-Walser-

Preis der Stadt Biel für seinen

Erstlingsroman «Max» begann. Wie

Walser beherrscht auch Zschokke

grandios die Kunst der offensiven

Selbstverkleinerung. Wie bei Walser

kippt auch bei Zschokke diese vorgebliche

Demutsgeste nie in Bitter erzählt

er vom Individuum in der modernen

Welt, das zwischen der Unzahl

der Möglichkeiten zu zerreissen

droht und sich darum in undefinierte

Räume und Zustände zurückzieht.

VERFLOCHTEN. Matthias Zschokkes

neues Buch handelt vom Reisen. Tatsächlich

hat er Berlin in den letzten

Jahren für seine Verhältnisse oft verlassen.

Im Auftrag einer Schweizer

Zeitung besuchte er Ortschaften der

alten Heimat von Grenchen bis Guggisberg.

Auf Einladung von Kulturinstitutionen

verbrachte er Monate in New York und Jordanien.

In kunstvoller Konstruktion verflicht er die

Erlebnisse an so unterschiedlichen

Orten auf eine Weise miteinander,

dass sie über das Leben selbst erzählen.

An allen Orten sucht Zschokke

das, was gilt und immer gelten wird.

Seine Figuren haben deshalb nie den

Weltekel eines Dandys, sie sind nicht

dekadent. Ein Massstab ist das Tempo

des menschlichen Gehens. «Wir

schaffen ungefähr fünf Kilometer in

der Stunde, das ändert sich nicht.»

Wenn Matthias Zschokke überhaupt

eine Botschaft hat, dann die: «Bei aller

Beschleunigung sind wir immer

noch Menschen. Wir müssen reisen.

Wir verlieben uns. Wir leben. Man

kann all diese Dinge nicht überspringen.

Das ist etwas Schönes. Wir müssen

dringend versuchen, selber zu

leben.»

GELASSEN. Matthias Zschokke kann

es in den letzten Jahren immer besser.

Die fortgeschrittene Lebenszeit

ermöglicht ihm eine Gelassenheit,

die er noch vor ein paar Jahren nicht

fand. Damals widerstrebte es ihm

schon, wenn ihn jemand an seinem

Schreibtisch fotografieren wollte.

«In dem Moment, wo mich jemand

da sitzen sieht, bin ich festgelegt. Der

Betrachter denkt dann, diesen Tisch

wollte der Zschokke so haben, dafür

hat er sich entschieden.» Dabei war

gerade das Sich-nicht-entscheiden-

Müssen der Grundton dieses Lebens,

das Zschokke aus guten Gründen

nach Berlin verlegt hat.

BEFREIT. Seit er um die fünfzig ist,

verschafft es ihm plötzlich Trost und

Befreiung, dieses Leben von der anderen

Seite der Biografie her zu betrachten

– vom Ende. «Wenn einer 28 Jahre im

selben Büro gesessen hat, kann man vielleicht

davon ausgehen, dass er das so wollte. Dass

ihm das entsprochen hat.» Die Zeit selbst

hat ihm eine Entscheidung abgenommen.

Der Mensch Zschokke ist mit den Jahren

heiterer geworden, und damit auch sein Schreiben.

Fotos von sich an seinem Schreibtisch

mag er aber immer noch nicht

besonders. Irgendwann in Zukunft,

wenn es den Mann nicht mehr gibt,

besteht nur noch der abgebildete

Eindruck seines Daseins. Das Provisorium

ist endgültig zur Behauptung

geworden. Zu viel Festlegung

für seinen Geschmack. Denn so

sind nun einmal bei aller Heiterkeit

die Dimensionen: Um weniger als

die Ewigkeit geht es bei Matthias

Zschokke nie.

„Basler Zeitung“, 18.11.2oo8

 




Jean qui pleure et Jean qui rit

Matthias Zschokke. Sa vision bien personnelle de la vie et des relations sociales atterrent

et réjouissent à la fois. Questions à l'auteur bernois installé à Berlin, de passage à Genève.

 

LAURENCE DE COULON

 

L'écrivain né à Berne et installé

à Berlin excelle à dire des vérités

inconvenantes avec dérision.

Dans son roman Maurice à

la poule, Maurice s'ennuie

dans son bureau de la banlieue

au nord de Berlin, écrit à son

associé, se rend au café dans ce

quartier que tout habitant non

résigné tentera de fuir au plus

vite. Le narrateur joue avec le

lecteur, raconte des banalités

d'une façon neutre qui prête au

sourire et n'ennuie jamais. Au

théâtre, La commissaire chan-

tante, L'ami riche et L'invitation

mettent en scène avec

humour des personnages pa-

thétiques qui poursuivent le

bonheur à travers l'argent de

leurs amis. Il va sans dire, in-

communicabilité et ridicule

sont au rendez-vous.

Maurice à la poule se déroule à

Berlin. Si vous ne vous étiez pas

installé à Berlin en 1980, écririezvous

de façon différente?

Matthias Zschokke: Oui, l'endroit

où l'on vit est toujours

important. On n'a jamais cette

lumière à Berlin, par exemple.

On dit que cette ville estvivante

et jeune, mais certains de

ses quartiers sont gris et vides,

comme celui au nord où je travaille

dans une usine désaffectée

et que j'apprécie pourtant.

Votre roman semble parler de l'absence

de sens de la vie.

Oui, il parle aussi de l'absence

de sens, mais j'espère que c'est

caché et que le roman est beaucoup

plus léger que ça. On peut

parler de choses difficiles de

manière légère. Mes précédents

romans sont plus

sombres. Je veux alléger la vie,

parce qu'elle est assez lourde

comme ça. Il ne faut pas le nier,

c'est important de le savoir,

mais il ne faut pas insister sur

cet aspect. ressentiel est de savoir

comment vivre avec cette

absence de sens. Je n'aime pas

la littérature qùi explique toujours

à quel point la vie est triste,

c'est trop facile. En Allemagne

surtout, si on est triste,

on est triste, point, alors que

j'aime avoir un ton neutre qui

n'explicite pas si la situation est

drôle ou pas et laisser le lecteur

décider.

Votre ton ressemble d'ailleurs un

peu à celui de Robert Walser, de

Samuel Beckett ou de Thomas

Bernhard.

Je les aime tous les trois. Je ne

sais pas comment on lit Beckett

en France, mais chez nous on le

trouve noir alors que je l'ai toujours

trouvé drôle malgré sa

noirceur. Thomas Bernhard,

lui, est toujours considéré comme

très drôle. Je pense qu'on

pourrait comparer mes pièces à

celles de Thomas Bernhard,

mais ça n'arrive presque jamais,

bien que cette référence

aiderait le public allemand à

saisir leur aspect comique. Walser,

c'est une autre histoire,

c'est tellement compliqué

qu'on ne peut pas dire. C'est

Walser. C'est incomparable.

Est-ce que Maurice est un personnage

unique ou représente-t-il

quelque chose en particulier?

Je joue avec mes personnages.

Je veux que le lecteur se demande

qui est ce Maurice. Autrefois,

je voulais toujours que

mon personnage puisse être

indifféremment un homme ou

une femme. Aujourd'hui, je

sais qu'il y a vraiment une différence

entre les hommes et les

femmes, mais ce serait bien

qu'une lectrice puisse aussi

s'identifier à Maurice. Il représente

une idée d'attitude. J'aspire

à ce que des lecteurs se disent:

«Ah lui, c'est un Maurice.»

Vous mettez souvent en scène un

narrateur à qui l'histoire échappe

dans vos romans.

Ce n'est pas un programme. J'ai

l'idée qu'il faut laisser de l'air

au lecteur. Si je racontais l'histoire

d'une façon très stricte, et

que je prétendais tout savoir en

tant que narrateur, je la fixerais

comme une photo, alors que

j'essaie de le faire comme les

impressionnistes. J'aimerais

impliquer le lecteur. Quand je

lis, je travaille moi -même beaucoup,

et en tant qu'écrivain, je

tente d'affectede lecteur.

Dans vos pièces et·dans Maurice à

la poule, les relations sociales sont

souvent détestées et évitées par

vos personnages. Pensez-vous

tout de même qu'il existe des relations

sincères et agréables?

Maurice a une amie avec qui il

est à la fois très proche et très

éloigné. C'est comme ça dans

la vraie vie, on est habitué à

l'autre mais on ne le comprend

pas. Au début du roman, Maurice

raconte qu'Hne veut pas voir

son ancien ami parce qu'il n'a

aucune idée de ce qu'il pourrait

lui raconter, et pour moi, c'est

la vérité, mais les gens ne sont

pas toujours prêts à en prendre

conscience.

"La Liberté",  Fribourg, 2.5.2oo9




Drôle de rêveur solitaire

Paru le Samedi 02 Mai 2009

PROPOS RECUEILLIS PAR ANNE PITTELOUD    

CultureRENCONTRE Dans «Maurice à la poule», Matthias Zschokke met en scène un personnage désoeuvré qui tente de faire face au vide. Un régal, sur le fil entre mélancolie et dérision, douceur et douleur.
«Pour moi comme pour Maurice, il est plus facile de ne pas voir les gens, d'éviter les interactions sociales. Mais ça n'est pas bien, la Bible dit qu'il ne faut pas être seul!» rit Matthias Zschokke, qui cite d'ailleurs le passage en question dans son roman Maurice à la poule, récemment paru en français chez Zoé en même temps que trois pièces de théâtre. La semaine dernière, l'auteur bernois avait fait le déplacement depuis Berlin, où il s'est installé en 1980, pour rencontrer ses lecteurs au Salon du livre de Genève. Charmant, souriant, des allures de jeune homme et le contact chaleureux: Matthias Zschokke parle de son travail dans un français fluide, s'enthousiasme, passe soudain à l'allemand pour être plus précis, se tournant alors vers sa traductrice. Traduire Zschokke? «Mon souci principal est de ne pas laisser le texte redescendre, s'alourdir», explique Patricia Zurcher. «Il s'agit de garder une écriture vivante, légère, de percevoir les différents registres de langage et de trouver en français ce ton qui tient le milieu, qui se situe sur le fil.»
C'est que l'écriture de Zschokke est paradoxale, en équilibre entre douceur et douleur, ironie et tendresse, profondeur et cocasserie. Pour dire le désenchantement du quotidien, il crée des personnages perdus aux rêves lézardés, qui peinent à vivre leur vie; mais ce sont leurs mésaventures et leurs façons de déjouer la peur qui nourrissent l'humour. La tonalité singulière de ses textes surgit du décalage entre leur sujet, mélancolique, et une langue truffée de clins d'oeil, de mots pris à la lettre. Ainsi de Maurice à la poule – titre emprunté à un tableau d'Anker qui fait rêver le protagoniste –, où comme souvent chez Zschokke l'intrigue est mince, basée sur de petits riens qui tiennent pourtant le lecteur en haleine.
Ecrivain public, Maurice passe ses journées à ne rien faire dans son bureau des quartiers nord de Berlin, zone sensible et désertée. En attendant ses rares clients, il écrit à son ami et associé Hamid, à Genève, se souvient, pense parfois à sa compagne en voyage, se promène, écoute un violoncelle jouer quelque part derrière la paroi, tente vaguement de trouver où est le musicien dans le dédale des immeubles tout en détestant l'idée de devoir parler à quelqu'un... Confronté au vide et à l'ennui, Maurice observe son environnement, attentif à l'infiniment petit pour conjurer la panique. Comme son personnage, Matthias Zschokke creuse le présent dans une écriture verticale, qui va en profondeur, attentive aux détails. Se dessine ainsi une méditation sur le temps, la fuite de soi, la solitude fondamentale de chacun.


Maurice incarne une situation existentielle que nous partageons tous: cette peur du face-à-face avec soi...

Matthias Zschokke: Certains trouvent insupportable ce que je décris ici, mais c'est en effet notre situation à tous. Quand on n'a pas de profession ni d'activité, quand on reste assis à sa table à ne rien faire, là commence la vie... Maurice est forcé d'être dans le présent, il n'est pas héroïque mais essaye de vivre jour après jour, heure après heure. Il nous confronte à nous-mêmes: l'idée d'avoir du temps, de ne rien faire, nous terrifie.
Dans la scène au bord du lac de son enfance, il atteint une sorte de plénitude: il est proche de la réalité de l'expérience, là où elle coïncide avec le présent. Je pense que le bonheur se trouve dans la capacité à vivre le moment, qu'il soit intéressant ou non. Quand j'observe vraiment ce que font les moineaux, je les trouve merveilleux et drôles. Si on arrivait toujours à regarder de cette manière, la vie serait belle...


Au-delà de l'angoisse, Maurice découvre une façon d'habiter l'instant. Cette attention au présent passe-t-elle par le langage?

– Oui, tout se joue dans la langue. Confronté au néant, le personnage se bat avec la langue: c'est tout ce qui lui reste, le lieu où respirer. Ce qui fait souffrir est moins douloureux si on peut l'exprimer, l'écrire.


Il est contemplatif, attentif aux détails du quotidien: une figure de l'auteur?

– J'essaye d'aborder des sujets qui semblent cruels ou délicats en les décrivant de façon très objective. C'est ce qui les rend supportables. Je pense à la vieillesse, à la solitude, ou à cette scène de sexe sur le balcon: écrire sur ce sujet était neuf pour moi, et j'ai essayé de trouver une forme qui convienne, de décrire chaque geste très objectivement. Au final, il me semble que la scène est agréable à lire, pas pornographique. Le fait qu'elle se révèle finalement un fantasme de Maurice l'allège aussi.
Mais tout ceci est très théorique, et je ne fais pas de théories mais des expérimentations! Je n'ai pas de programme poétique ou philosophique, mais je suis une logique musicale: je cherche à équilibrer gravité et légèreté, à donner un rythme au récit par le biais des lettres et du narrateur – ses interventions sporadiques instaurent un écart entre moi et le personnage de Maurice. Cette juxtaposition de discours génère des ruptures, des changements de ton, qui créent une distance et une tension. Ainsi le roman est dynamique malgré l'absence d'histoire. Il y a aussi ce mystérieux violoncelle qui joue quelque part, suscitant une attente – la seule du roman peut-être.


Quel regard portez-vous sur vos personnages?

– J'ai pour eux beaucoup de tendresse. Ce sont des paumés de la vie, mais ils sont là et essayent d'avancer malgré tout. Ils inspirent de la pitié, ils sont ridicules, mais le regard que je porte sur eux n'est jamais méchant ni cruel, simplement humain. Des lecteurs ont trouvé «horrible, sans pitié», la manière dont je décris la mère de Maurice. Mais je l'aime bien, elle est victime, et en même temps je hais cette vieille qui n'a jamais pensé de sa vie. Elle est comme ça, il faut l'accepter et l'écrire. C'est une question d'équilibre: je ne veux pas prendre parti pour ou contre, mais demeurer dans l'indécis.


Une indécision qui renvoie le lecteur à sa responsabilité.

– Oui, c'est à lui de s'emparer du texte et de donner le rythme, de choisir son versant – grave ou drôle –, ou de vibrer dans les deux registres en même temps. Mais attention, il ne s'agit pas d'un effort intellectuel ni d'un concept, je veux raconter! Tout se passe dans l'immédiat, dans le mouvement même de la lecture.


Tous les lecteurs perçoivent-ils ces deux facettes?

– J'estime en effet que mes textes sont comiques et tristes à la fois. En France et en Suisse, les gens rient et cela me fait très plaisir. Mais en Allemagne, le côté comique n'est absolument pas perçu – on n'y voit pas non plus la profondeur de Robert Walser, mais seulement son côté léger. Le public francophone a un autre arrière-plan culturel et littéraire – le mot «caustique» n'existe pas en allemand, par exemple. Mais la traduction rend-elle mes livres plus drôles? Ou alors est-ce l'humour suisse qui est différent, puisque les Alémaniques rient aussi?
Mystère!

„Le Courrier“, Genève

 




(Le Matin/ Genève)

Matthias Zschokke: «Je parle de Berlin plus librement qu'un Allemand»






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Déjeuner avec Matthias Zschokke lundi16 novembre 2009
 

«Je tremble pour trouver le mot juste»

Par Lisbeth Koutchoumoff

 

L’écrivain bernois Matthias Zschokke a reçu mardi dernier à Paris le Prix Femina étranger pour «Maurice à la poule», son troisième roman, paru aux Editions Zoé

C’est toujours une sensation amusante d’entendre parler un écrivain et d’avoir l’impression de se retrouver dans l’un de ses romans. Cela ne se produit qu’avec les auteurs qui déploient, de livre en livre, un univers très reconnaissable. Le Bernois Matthias Zschokke est de ceux-là. Il a remporté à Paris mardi dernier le Prix Femina étranger pour Maurice à la poule, son troisième roman, long rêve éveillé d’un personnage qui regarde la vie s’ébattre tout autour de lui sans jamais y prendre part totalement. A moins que Maurice n’ait trouvé, par son attention au presque rien, à l’infime et au banal, le moyen d’y goûter pleinement et d’en rire. Et le lecteur avec. Entre deux plages douces-amères, Maurice à la poule fait s’esclaffer.

Matthias Zschokke, drapé dans un grand manteau noir, débouche de la douane TGV à Genève, la mine heureuse, un rien plissée par les agapes parisiennes. Est-ce qu’un prix littéraire français compte pour un auteur alémanique qui vit depuis 30 ans à Berlin? Ça peut aider à vivre, oui, parce qu’avoir connu le succès littéraire en Allemagne dès son premier roman, Max, au début des années 80, s’être fait remarquer à la réalisation puis avec ses pièces de théâtre, tout cela n’assure pas des fins de mois paisibles. Et Matthias ­Zschokke, grand traqueur de postures en tous genres dans ses livres et ses pièces, ne va pas endosser celle de l’écrivain vivant d’inspiration et d’eau minérale gazeuse.

Direction Carouge, fief des Editions Zoé de Marlyse Pietri qui soutient l’écrivain depuis 20 ans. En ligne de mire, le Café du Tessin, pas loin, où officie le chef Philippe Wetzler depuis la fin de l’été. Dans le tram qui y conduit, le Bernois-Berlinois s’étonne encore d’avoir pénétré l’univers des prix littéraires français qu’il observait jusque-là de loin, s’amusant des rumeurs d’intrigues à tiroirs sans fond. Souligne aussi combien il a été touché par la précision, l’intelligence et la chaleur des commentaires des douze jurés, toutes femmes de lettres. Combien elles semblaient fières de leur découverte helvétique, cinglant démenti aux fameuses rumeurs, incarnation du coup de cœur purement littéraire.

A part cela, cela se passe comment, en vrai, un prix? C’est là que Matthias Zschokke fait du Matthias Zschokke. Dans le tram toujours: «Vous connaissez l’Hôtel Crillon? Un palace de rois, vraiment. Nous y surgissons, Marlyse Pietri, Patricia Zurcher la traductrice et moi. Nous sommes conduits devant une porte. On nous y laisse longtemps. Une heure au moins pendant laquelle rien ne se passe ni personne ne vient. Pas de verre d’eau ou de mot de bienvenue. Tout à coup, la porte s’ouvre. On entre et on se retrouve dans un salon où se tiennent douze femmes. Elles mangent autour d’une table. Nous nous mettons un peu sur le côté. On attend. Rien ne se passe. Et puis, une à une, elles se lèvent de façon détendue et improvisée, viennent vers nous et nous parlent magnifiquement de Maurice à la poule. Puis une autre porte s’ouvre et une quantité phénoménale de photographes surgit dans une fièvre digne du Festival de Cannes. Ils canardent comme s’il n’existait aucune actualité plus importante que celle-là. Le calme revient. Pas de discours ou de café. Ni de papier qui atteste que j’ai reçu ce prix. Est-ce que je l’ai bel et bien reçu? Oui, j’en suis sûr pourtant. Et puis on est partis.»

L’atmosphère de petite brasserie calme du restaurant emballe littéralement l’écrivain sitôt le seuil passé. Lui qui à la descente du train aspirait au jeûne intégral après les émotions parisiennes opte sans sourciller pour le plat du jour, steak de cheval sauce roquefort.

Avant de devenir Berlinois, Matthias Zschokke a grandi à Ins, dans le canton de Berne. Un village discret où tous les trains, même ceux pour Paris, s’arrêtent. A cause d’une lourde histoire de rails et de voies. Stupeur des voyageurs plantés devant une gare en rase campagne. Le village se situe sur les hauteurs. On ne peut s’empêcher de penser que Ins et sa gare perdue ont joué dans l’attention que porte l’écrivain aux lieux de transit, de côté, en jachère du monde. Mais on préfère ne rien dire. Ins a servi de modèle à Friederich Dürrenmatt pour La Visite de la vieille dame, enchaîne l’écrivain. En route pour Berne, Dürrenmatt subissait Ins.

Cela ne fait pas longtemps en fait que Matthias Zschokke se sent, un peu, écrivain. L’écriture ne tient pas du tout du rêve d’enfance. C’est le théâtre et le métier de comédien qui lui donnent le courage d’écrire ses premiers mots. Dans l’envie de dépasser une timidité rebelle, il suit l’école d’art dramatique de Zurich et se retrouve engagé à Bochum en Allemagne où règnent le metteur en scène Peter Zadek et son comparse Fassbinder. Passions, intrigues et déchirements. «Bochum? Une vie, vraiment.»

Au départ du maître, le tout jeune Zschokke choisit Berlin la coupée en deux, la bon marché surtout pour vivre du théâtre. «A la fin des années 70, Berlin réunissait tous les jeunes Allemands qui ne voulaient pas faire leur service militaire. Il suffisait de s’installer à Berlin pour être exempté. En pleine Guerre froide, on vous payait presque pour venir là et renforcer le barrage contre les Soviétiques!» rappelle l’écrivain.

Il trouve un hangar désaffecté dans le quartier de Wedding et n’en a plus bougé jusqu’à aujourd’hui. Mais d’ici à trois mois, il en sera chassé. Le Mur est tombé, faut-il le rappeler, et la spéculation et les chantiers immobiliers sont devenus le quotidien des Berlinois. «Deux entrepreneurs, un Italien et un Allemand, vont transformer le hangar en lofts chics. On leur a dit sans doute que le quartier de Wedding est près du centre. Or Berlin n’a pas de centre. Et Wedding est une zone très problématique, habitée par des chômeurs et des immigrés. Ainsi avance la globalisation…»

Habité par les mondes et dialogues de Tchekhov le Russe et Hofmannsthal l’Autrichien, Matthias Zschokke écrit d’abord pour ses amis comédiens. Et puis se lance, à 26 ans, «sans savoir ce que je faisais», dans l’écriture d’un roman sans intrigue, ni forme connue. «Je crois que je voulais perdre définitivement la peur d’écrire.» En 1982, quand Max paraît, les critiques allemands se frottent les yeux, clament la fin de la littérature politique et l’avènement d’un style nouveau.

Aujourd’hui, Matthias ­Zschokke doute que ce premier essai soit encore lisible. Pourtant Max annonce Maurice. «Vous trouvez?» s’inquiète l’écrivain. Deux narrateurs indécis, poreux au monde, tout en regards, insouciants de toute intrigue. On insiste. «Je ne parle que de moi, c’est vrai. J’ai le rêve de pouvoir créer des personnages à la façon de Flaubert qui se formait à la médecine ou presque pour élaborer le personnage de Monsieur Bovary. J’ai essayé quelques fois. Mais je reviens à moi.»

Mais il ne se raconte pas pour autant, déteste l’exhibitionnisme. Revenir à soi ici équivaut en fait à chercher le commun à tous, l’émotion qui naît de la simple conscience d’être là. D’où ces pages sur un rai de lumière qui colore un bout de trottoir. «Au début, j’écrivais sans être vraiment conscient des mots, de leur force, de leurs couleurs. Maintenant, je tremble devant eux. Quand je dois parvenir à traduire au plus juste une émotion. Savoir s’il faut faire intervenir un bout de ciel ou pas. Peut-être que je suis devenu, un peu, écrivain.»




Matthias Zschokke: «C’est idiot d’écrire un nouveau livre»

Interview | Matthias Zschokke, Femina étranger 2009, s’amuse de ce rien qu’est la vie. Rencontre.

 


LIONEL CHIUCH | 29.12.2009 | 00:03

 

On avait lu Maurice à la poule. On s’était dit: quel choc! Cette écriture singulière et puissante, cette capacité à saisir l’essentiel tout en adoptant la distance et l’humour nécessaires. On était ressorti de l’expérience bouleversé, convaincu d’avoir affaire à un grand auteur, dans la lignée d’un ­Robert Walser.

Du coup, quand Matthias ­Zschokke – né à Berne en 1954 – a décroché le Femina étranger 2009, on n’a pas été vraiment étonné. Ce qui n’est pas le cas du principal intéressé, évadé de sa tanière berlinoise le temps de se glisser dans sa nouvelle peau.

Recevoir le Femina, ça signifie quoi pour vous?
C’est très étrange. Il ne faut pas seulement gagner le prix, il faut aussi représenter le lauréat. Et je ne sais pas si j’y arrive: je suis Suisse et un peu protestant. J’ai toujours pensé que si je gagnais un prix de ce genre, ma vie changerait. En fait, c’est à moi de changer ma vie…

Ça a été une surprise?
Beaucoup d’auteurs peuvent gagner, il y a de la littérature de qualité partout. Ce qui me touche vraiment, c’est qu’on ne connaissait personne au ­Femina et on ne sait pas vraiment pourquoi on l’a décroché. Marlyse (ndlr: Pietri, la directrice des Editions Zoé) ne ­connaissait pas ces femmes, et on sait la part de relationnel qui intervient dans ce domaine. Donc, c’est un peu comme un rêve d’enfant.

Dans «Maurice à la poule», un personnage déclare: «Je devrais me surestimer de toutes mes forces puisque nos contemporains nous sous-estiment fondamentalement.» Ce prix, c’est aussi une marque d’estime…
Je ne sais pas: c’est un moment très court. On a le sentiment d’être estimé pendant un jour ou deux. Et puis on sort et personne ne vous connaît. Ou peut-être qu’on ne se rend pas compte que les choses ont changé.

Est-ce que vous pensez qu’un prix peut bloquer une écriture?
Je suis bloqué par l’âge, plutôt. Ça devient de plus en plus dur d’écrire. On m’a raconté que les écrivains âgés ne peuvent plus écrire des pièces: parce qu’ils n’ont plus la force d’endosser tous les personnages. Ça devient de plus en plus difficile d’inventer des choses, de s’exprimer sans douter.

Quand on pose votre roman, on peine à le résumer alors qu’on en est imprégné. Il reste toujours une part insaisissable, un peu comme les personnages…
Oui, c’est un problème. A Paris, il y a des journalistes qui me demandent: qu’est-ce que c’est que ce livre? Pour répondre, vous devez préparer quelques courtes phrases. Et moi, je ne sais pas quoi dire. C’est quoi ce livre? Je ne sais pas. C’est un livre. Et ce n’est pas du tout moderne. Notre vie va bien plus vite que cette littérature.

La modernité, c’est peut-être, justement de prendre le temps. De se dire, aussi, que de ne pas avoir d’espoir, ça offre une immense liberté.
Je pense que c’est une liberté, oui, l’absence d’espoir. Une manière d’être plus léger.

Un auteur, c’est avant tout un lecteur. Quelles œuvres vous ont marqué?
Je lis lentement. Et peu. J’aimais les Russes: Tourgueniev, Tchekhov… Et puis Flaubert, que je trouve phénoménal. De plus en plus, lire devient un travail. Je lis pour apprendre à écrire. Afin de dire les choses plus précisément. Lire et écrire, c’est la même intensité, la même concentration. Je pense que maintenant la littérature m’influence même plus que la vie. C’est un autre degré. On aime de plus en plus être dans la littérature: c’est plus vivant. C’est triste, parce qu’il faut estimer la vie. Aller dehors et voir la neige, par exemple. Mais si on arrive vraiment à traduire ce qu’est la neige dans la littérature, alors là ça devient génial.

Vous dites que la littérature ouvre un vaste champ de possibles. En même temps, vous vous concentrez sur le quotidien, qui n’a rien d’épique…
Oui… Reprenons l’exemple de la neige. Dans un mauvais roman, on lit: «Il neige.» Qu’est-ce que ça signifie? Dans Maurice, il y a un passage avec des moineaux. Trouver les mots justes pour parler de ces moineaux, voilà ce qui est intéressant. Rien qu’avec ça, on pourrait faire une histoire. Moi, je n’ai pas beaucoup d’idées: je trouve qu’il faut d’abord installer la réalité. Et c’est très difficile. Qu’est-ce que cette table devant nous? Comment l’installer dans une page? Les vrais génies, après, racontent une histoire qui tourne autour de cette table. Moi, j’en suis toujours à essayer de la décrire.

C’est presque une démarche philosophique…
Oui. Parce que nous pensons tout savoir. Mais on ne connaît rien: on est tous à un niveau nul. Il faut sans cesse apprendre. C’est horrible, mais tout est déjà écrit. Il ne faut pas faire de nouveaux livres: c’est idiot d’écrire encore sur les choses. Mais peut-être que tout le monde doit essayer de dire tout à nouveau, et de le dire à sa manière. Et ce qui est intéressant, c’est justement d’essayer…

Tribune de Genève, 29. 12. 2009













MATTHIAS ZSCHOKKE IN MONTPELLIER

C’est grâce à Friedrich Dürrenmatt qu’ont vu le jour les Archives littéraires suisses (ALS), en janvier 1991. Après vingt ans d’existence, cette véritable mémoire littéraire de la Suisse compte plus de 300 fonds d’auteurs en provenance des quatre régions linguistiques. Dürrenmatt (1921-1990) avait proposé de léguer gracieusement sa documentation à la Confédération suisse si celle-ci s’engageait à créer une institution nationale d’archives littéraires, afin de collectionner et conserver les fonds, de les cataloguer, de les étudier et de les diffuser. En 1989, les représentants de l’écrivain et peintre alémanique trouvent un accord avec la Confédération, et les ALS sont inaugurées à la Bibliothèque nationale suisse le 11 janvier 1991. Le même jour se déroulait une cérémonie à la mémoire de Dürrenmatt, décédé quelques semaines avant l’ouverture des ALS, le 14 décembre 1990.
Au moment de leur création, les ALS reprennent la section des manuscrits de la Bibliothèque nationale, qui comptait quelque 150 fonds, essentiellement de Suisse alémanique et romande (notamment ceux de Blaise Cendrars, Corinna Bille, Hermann Hesse et Annemarie Schwarzenbach). Les Archives ont ensuite étendu leurs activités aux littératures romanche et italophone – le don de ses documents par Giovanni Orelli marque une étape importante. Aujourd’hui, on y trouve notamment les fonds d’Adolf Muschg, Paul Nizon, Jacques Chessex, Alberto Nessi, Maurice Chappaz, Anna Felder, Robert Walser, Peter Bichsel, Etienne Barilier, Georges Borgeaud, Anne-Lise Grobéty ou Grisélidis Réal.
Cet anniversaire était l’occasion de donner la parole à trois écrivains suisses qui ont confié leur documentation aux ALS : Vahé Godel (né en 1931 à Genève), Matthias Zschokke (né en 1954 à Berne) et Giovanni Orelli (né au Tessin en 1928).


Anne Pitteloud : Quand avez-vous déposé vos archives aux ALS ?
Matthias Zschokke : Il n’y a même pas une année. C’est à cause de mon ami Niels Höpfner, de Cologne. Je lui écris des lettres, des fax et des mails depuis trente ans (Matthias Zschokke vient de publier une partie de cette correspondance dans Lieber Niels, aux éditions allemandes Wallstein, ndlr). Comme Niels a étudié les lettres (théâtre et littérature allemande), il a conservé tout ce qu’il a reçu de moi, m’expliquant qu’un jour ces archives seront importantes pour les études littéraires. Je riais de lui. Je n’ai jamais fréquenté d’université et n’ai jamais pris les académiciens au sérieux. De plus, je lui expliquais que je devais d’abord mourir et devenir célèbre pour que mes lettres soient intéressantes.
Niels fume. La peur de s’endormir un jour avec une cigarette allumée grandissait dans sa tête. Il craignait de brûler toutes ces lettres dont il était persuadé qu’elles étaient précieuses, et ça le paniquait. Il a pris contact avec les Archives littéraires à Berne et leur a demandé si elles étaient intéressées par ces lettres. On lui a expliqué que les ALS n’achetaient pas une correspondance sans avoir toutes les archives de l’écrivain en question, et qu’elles n’aimaient pas faire des affaires avec des « marchands », mais préféraient donner l’argent à l’auteur lui-même, afin de ne pas encourager le marché professionnel de manuscrits.
Je n’avais jamais vraiment gardé mes affaires réglées et classées. Malgré tout, après trente ans, il y avait un manuscrit là, quelques lettres privées ici, etc. Comme Niels souhaitait que je gagne de l’argent avec cette transmission, il m’a fait cadeau des lettres, fax et mails qu’il avait collectionnés, et j’ai pu les vendre avec mes propres archives à Berne. Je n’ai vendu que les lettres et les archives actuelles ; je ne supporte pas l’idée de vendre des choses dont personne ne sait si elles existeront un jour. Si je deviens un grand poète célèbre, la deuxième partie de mes archives sera précieuse – sinon, elle ne vaudra rien. [...]
Qu’avez-vous choisi de confier aux ALS ? [...]
MZ: Tout. Je n’ai pas un rapport fort avec mes vieilles choses. Ce qui est passé est passé pour moi. Je le jette ou le mets dans un carton. Il est rare que je relise d’anciens textes ou que je regarde des photos du passé. J’ai donc tout confié. [...] Je ne comprends pas l’intérêt des chercheurs. Ce que je trouve intéressant, ce sont ces lettres, fax et mails à Niels, parce qu’on y trouve toute la vie d’un Suisse qui essaye de devenir écrivain et vit plus tard en tant quel tel à Berlin, pendant les années 1980 à 2010. Cela forme une chronique détaillée qui aborde une foule de thèmes, la politique (avec la chute du Mur par exemple), les développements du théâtre, l’argent, les loyers, dieu, le monde entier – toute une vie. Cette longue durée et cette intégralité sont rares, cela me fait penser à Samuel Pepys, contemporain de Shakespeare (membre du Parlement et écrivain anglais, connu surtout pour son « Journal » qui couvre la période 1660-1669, ndlr). Moi-même, je ne m’intéresse pas aux versions différentes d’un texte. Je lis ce que l’auteur a publié – cela me suffit. C’est pour ça que je ne comprenais pas vraiment l’importance d’archiver. Mais un jour, par hasard, j’ai lu une première et une dernière version d’un texte d’Adalbert Stifter. Je les ai comparées et ça a été une révélation : je pouvais voir comment travaille un vrai poète. Je n’ai jamais mieux saisi qu’alors ce que c’est de travailler comme poète. J’ai donc compris que disposer de versions différentes peut être sans prix.[...]
Depuis l’existence des ALS, la Suisse commence à réaliser que sa littérature vaut la peine d’être remarquée et respectée. Il n’y a pas seulement Goethe et Voltaire qui méritent d’être conservés, mais également des Suisses... Je pense que la reconnaissance et l’intérêt pour la littérature suisse ont augmenté dans la population. [...] Comme j’ai peu de rapport avec mes archives, la transmission ne signifie pas grand-chose pour moi. Quand j’ai confié mes manuscrits, je me suis senti soulagé, j’avais gagné de la place pour respirer. Dès ce moment, j’ai commencé à garder les textes de manière plus consciente. Je décide maintenant si telle chose vaut la peine d’être conservée ou non.[...]
Quel est selon vous le rôle de la mémoire littéraire, de l’héritage littéraire ?
MZ : Je ne pense pas que la mémoire littéraire a beaucoup à faire avec le travail des ALS. Il faut lire les textes des décédés, absolument, et peut-être que les archives ouvrent parfois les yeux sur un auteur qui serait autrement oublié. Mais l’héritage littéraire n’est pas exclusivement conservé dans les archives, plutôt dans les bibliothèques. Bien sûr, si l’on valorise une oeuvre dans des archives, cela augmente le poids et l’importance de son auteur.
Savez-vous si des études sont en cours sur vos archives et si des chercheurs s’en occupent actuellement ? Si oui, sous quel angle ?
MZ : Mes archives ne sont pas encore enregistrées, on ne peut donc pas encore les étudier.

Propos recueillis par Anne Pitteloud, "Le Culturactif Suisse", Lausanne, 14.7.2o11





Matthias Zschokke au fil de l'eau

Fragebogen

Tagesgespräch, SRF, 1o.5.2o13