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Daniel Boucher s'est éveillé à "Dix mille matins"


Article paru le 11 janvier 2000 sur Canoe


Daniel Boucher est l'une des grandes découvertes musicales de 1999. Son premier album, "Dix mille matins", tout comme ses prestations sur scène, ont suscité d'élogieuses critiques. Une réaction bien méritée pour cet auteur-compositeur-interprète qui émerge encore d'une profonde démarche d'introspection et d'une période de disette.

"Dix mille matins, c'était mon âge il n'y a pas longtemps. J'ai eu dix mille matins quelques mois après mes 27 ans", dit-il. Et le matin, c'est le recommencement. L'occasion qui est donnée à chacun de nous de prendre une nouvelle décision."

Voilà qui colle très bien à la vie qu'a menée Daniel Boucher ces dernières années. Ses dix mille matins ont été marqués par mille et un détours. Le jeune homme a en effet hésité longtemps à faire le saut dans la vie musicale.

Il a bien caressé le violon à 14 ans, mais "c'était trop straight". Parlez-lui plutôt d'une bonne vieille guitare, comme celle qui est entrée dans sa vie vers l'âge de 18 ans.

"Mais j'avais besoin d'un job plus payant que celui de musicien et j'ai commencé un DEC en génie civil. J'avais presque terminé, j'étais en cinquième session, quand j'ai tout lâché après avoir donné un show", raconte ce Montréalais aux racines gaspésiennes.

Daniel Boucher faisait alors partie du groupe Louise et les Gentils Meussieux, qui a remporté le concours Cégeps Rock en 1993. Daniel quittera rapidement le groupe, pour se consacrer à sa relation intime avec la musique.

"J'ai vécu une période assez difficile pendant deux ans. Je suis retourné aux études en musique, et j'ai voulu aussi fouiller en moi-même, faire une démarche en profondeur, explorer ma musique. Je menais carrément une vie parallèle: j'écrivais la nuit, il n'y avait plus que le moment présent, j'avais détruit toute notion de temps terrestre."

Deux ans à se poser des questions existentielles, à sonder son intérieur, à avoir les poches vides, à emprunter et à supporter les regards d'incompréhension des proches. Mais de cette période, au cours de laquelle il a frôlé le dérapage, est né "Dix mille matins".

"Si je n'avais pas fait cette introspection, il manquerait quelque chose. Et je n'arriverais pas aujourd'hui à vraiment défendre ce qui est là-dessus."

Il faut croire que c'est vrai, puisque Daniel Boucher remportera le premier prix en 1997 du Festival de la chanson de Petite-Vallée, catégorie auteur-compositeur-interprète. La chanson primée du festival sera "La désise", dans laquelle il raconte justement sa gêne d'avoir été en apparence si profiteur et si lâche pendant deux ans.

"Mais même à cette époque-là, je ne me sentais pas prêt pour un album. Quand j'ai rencontré Marc Pérusse, mon réalisateur, je lui ai apporté des disques auxquels je voulais ressembler, mais aussi d'autres auxquels je ne voulais pas ressembler du tout."

"C'est là que j'ai vraiment défini mon son. Je n'avais pas envie d'un son trop léché, trop poli. Je voulais que ça soit un peu poilu, effronté, à mon image."

Le résultat fut un album qui rappelle le joual et l'audace de Charlebois à certains, la musicalité parfois barbare de Fred Fortin à d'autres, la liberté de Jean Leloup à plusieurs. Onze chansons, dont lesplus récents extraits sont "Aidez-moi" et "Ça".

"J'ai envie que les gens mettent les écouteurs et entendent une peinture. Personnellement, j'aime quand une chanson m'amène ailleurs, quand les sons sont étrangers. J'essaie donc de faire voyager, de faire traverser des époques."

"Je n'ai pas encore trouvé toutes les réponses. Une des choses que j'ai apprises, c'est que nous avons bien souvent plus de contrôle sur notre vie que nous le pensons. Mais la seule personne sur qui nous avons plein contrôle, c'est nous-même."

"Au moins, depuis la sortie de l'album, l'histoire se poursuit de façon beaucoup plus heureuse qu'elle a commencé. J'ai enfin du concret, et je peux maintenant aller en parler partout."