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Éveil de l’opposition

LES SAINTS DES DERNIERS JOURS se considéraient comme des citoyens américains loyaux et furent indignés quand ils apprirent qu’une grande armée était en route pour écraser une «rébellion mormone». Se rappelant les persécutions du passé, les colons craignaient d’être une fois de plus chassés de chez eux. Pendant les mois qui suivirent, les saints se préparèrent à se défendre. Les dirigeants et les membres de l’Église n’étaient pas disposés à subir de nouveau l’oppression.

Deux problèmes étaient au centre du conflit de l’Église avec le gouvernement fédéral: la pratique du mariage plural par les saints et la mainmise de l’Église sur le gouvernement territorial d’Utah. Lorsque l’Utah demanda de nouveau à devenir État en 1856 et rencontra une opposition ferme, la «question mormone» entra dans la politique nationale.

Le parti républicain national fut fondé en 1854 en tant que parti fermement antiesclavagiste et présenta son premier candidat à la présidence en 1856. Dans sa campagne électorale, il recommandait que le Congrès interdise dans les Territoires les deux survivances de la barbarie: la polygamie et l’esclavage. Les démocrates, ne souhaitant pas avoir l’air de soutenir la polygamie alors qu’ils soutenaient l’esclavage, dénoncèrent les mormons avec autant de véhémence que les républicains. James Buchanan, candidat démocrate vainqueur, jura, pendant sa campagne présidentielle, que s’il était élu, il ne laisserait pas Brigham Young gouverneur de l’Utah.

Vers cette époque, de nouveaux conflits se produisirent en Utah entre les saints et quelques fonctionnaires territoriaux mécontents qui s’étaient donné pour tâche d’essayer de changer le mode de vie des saints des derniers jours. Des lettres et des comptes rendus verbaux de la part du géomètre général, de trois agents indiens, de deux juges à la Cour suprême et de l’ancien receveur des postes des États-Unis parvinrent à Washington, ce qui ne fit qu’empoisonner davantage l’esprit des politiciens de l’Est contre l’Église. Les plus grands dégâts furent causés par le juge assesseur, William W. Drummond, qui entra en conflit avec les saints dès son arrivée en Utah en 1854. Il attaqua la juridiction des tribunaux de succession, que les habitants de l’Utah considéraient comme leur défense juridique la plus importante contre les assauts ennemis. C’était aussi un homme sans principes qui amena en Utah sa maîtresse, une prostituée de Washington. A un certain moment, il la fit asseoir au tribunal avec lui tandis qu’il blâmait les saints concernant leur manque de moralité. On apprit plus tard qu’il avait abandonné sa femme et ses enfants dans l’Est.

La pratique du mariage plural produisit des remous considérables dans la presse et fut combattue par les opposants à la polygamie. Comme l'Utah était un territoire des États-Unis et que les lois des territoires sont déterminées par le Congrès, la question du mariage plural fut portée devant cette institution et devint l'argument principal contre l'admission de l'Utah comme État.

Les attaques contre cette pratique prirent une telle importance que le Congrès, sous l'influence de politiques et de la presse, passa en 1862 une « loi contre la bigamie », dont le but était de mettre un terme à la « polygamie » chez les mormons.

Le 8 juillet 1862, le président Abraham Lincoln signa l'acte et rendit le fait de contracter un mariage plural punissable d'une amende de 500 dollars ou de cinq ans de prison ou les deux.

Dans l'ensemble, le président et les membres du Congrès n'étaient pas hostiles aux mormons, mais étaient opposés à la pratique de la polygamie. Le programme politique sur lequel Lincoln fut élu, contenait un point condamnant la pratique de la polygamie.

Par amitié pour les mormons, dont il avait fait la connaissance en Illinois, le président Lincoln négligea de nommer des officiers pour imposer l'application de la loi contre la bigamie.

Les opposants à la polygamie ne se contentèrent pas de laisser tomber le problème. La loi contenait une disposition interdisant à un groupement religieux dans un territoire de détenir des biens fonciers dont la valeur dépasserait 50.000 dollars. Ceci avait pour objectif direct l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours. Une tentative du gouverneur Harding d'Utah en 1863 de faire punir Brigham Young en vertu de cette loi échoua, la constitutionnalité de la loi tout entière étant douteuse.

Né à Marylebone, en Angleterre, George Reynolds (1 Janvier 1842 - 9 août 1909) fut une autorité générale de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, et servit très longtemps comme secrétaire de la Première Présidence de l'Église.

L'agitation contre la polygamie augmenta au cours des années, mais ce ne fut qu'en 1874 que la constitutionnalité de la « loi contre la polygamie » fut mise à l'épreuve et que l'on tenta de l'appliquer. Les mormons étaient certains que la loi était anticonstitutionnelle et que si un procès était porté devant les instances supérieures, elle serait proclamée anticonstitutionnelle et cela éclaircirait l’affaire. En conséquence, George Reynolds, secrétaire privé de Brigham Young, se porta volontaire pour mettre la loi à l'épreuve. Les officiers fédéraux du territoire semblaient tout aussi désireux d'éclaircir l'affaire par un procès amical. En conséquence, Reynolds fut inculpé. Il se présenta volontairement devant le tribunal et fournit la preuve des faits par lesquels il avait enfreint la loi. Il fut estimé coupable condamné à un an de prison et reçut l'ordre de payer une amende de 500 dollars. Appel fut fait à la Cour Suprême du territoire où il fut refusé sous prétexte que la Chambre des mises en accusation qui avait inculpé Reynolds était illégale.

 

Constitutionnalité des lois contre la bigamie

La constitutionnalité de la loi n'étant toujours pas décidée, un deuxième procès eut lieu en 1875 devant Alexander White, juge suprême d'Utah. La nature amicale du procès précédent était tout à fait absente, l'accusation devenant violente vis-à-vis l'accusé, et l'accusé à son tour refusant de fournir les éléments permettant de prouver qu'il y avait eu violation de la loi. Toutefois une condamnation fut obtenue, et Reynolds reçut la condamnation de 500 dollars d'amende et deux ans de travaux forcés au pénitencier. La Cour Suprême d'Utah confirma le décret et appel fut fait à la Cour Suprême des États-Unis, qui, à la surprise de l'Église et de nombreux juristes experts en constitution, confirma la constitutionnalité de la loi. Ce fut un coup terrible pour l'Église. La décision ne tomba toutefois que le 6 janvier 1879. Entre temps, Brigham Young était mort, et le collège des douze apôtres devenait l'autorité présidente de l'Église. Une tentative de rouvrir le procès de George Reynolds et une pétition pour que le pardon lui fût accordé échouèrent. Il fut mis en prison le 16 juin 1879.

En octobre 1880, la Première Présidence fut de nouveau organisée avec John Taylor comme président de l'Église. Sous son administration, la campagne contre « la bigamie » s'intensifia. Après la mort de Brigham Young et surtout après la décision de la Cour Suprême dans le cas Reynolds, les opposants à la polygamie œuvrèrent pour obtenir la fin de cette pratique. Leur action eut pour résultat le passage d'une nouvelle législation ayant pour but de supprimer les pratiques polygames. En mars 1882, le Congrès passa le « Edmunds' Bill » qui amendait la « loi contre la bigamie » de 1862. Cette mesure ajoutait à l'offense punissable des mariages pluraux ou « vie polygame », ce que l'on définissait comme « une cohabitation illégale ». La loi privait du droit de vote ou de détenir des offices publics tous ceux qui vivaient dans la polygamie. De plus, la possibilité de faire partie des jurés était refusée non seulement aux polygames, mais à toute personne qui seulement professait croire en la doctrine du mariage plural.

De plus, cette loi déclarait vacants tous les postes clés du territoire et prévoyait des officiers fédéraux à leur place. La loi Edmunds privait virtuellement l'Utah des droits d'autogouvernement qui étaient devenus un facteur caractéristique du gouvernement des territoires. La loi fut rendue rétroactive du point de vue des droits civiques, de sorte que quiconque avait vécu la loi du mariage plural était privé du droit de vote, même s’il ne la vivait plus.

Une campagne de procédures judiciaires fut alors entamée contre les hommes qui avaient contracté le mariage plural avant ou après le passage de la loi. Cette campagne dura pendant toute l'administration de John Taylor. Des centaines de domiciles furent violés, les maris et pères envoyés au pénitencier. Parce qu'elles refusaient de témoigner contre leur mari, des femmes furent envoyées en prison pour « insulte au tribunal ». Après la sévère condamnation prononcée contre Rudger Clawson en octobre 1884, se développa la « législation discriminatoire ». Cette décision des tribunaux permettait de prononcer des condamnations séparées contre un homme pour chaque journée où on le trouvait coupable de vivre avec une femme plurale.

Cette décision des tribunaux eut pour conséquence l'exil des dirigeants de l'Église, car elle revenait à proclamer qu'un homme qui pratiquait la polygamie, ou même essayait de pourvoir aux besoins de ses diverses épouses, pouvait, par une accumulation de condamnations séparées, être envoyé en prison à vie.

Cette « politique discriminatoire » fut condamnée par la Cour Suprême des États-Unis dans le cas de Lorenzo Snow, qui se présenta devant elle en février 1887.

 

Loi Edmunds-Tucker

En mars 1887, le Congrès passa une mesure encore plus draconienne pour supprimer la polygamie, mesure appelée la « loi Edmunds-Tucker ». Cette loi permettait la dissolution de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, qui enseignait la doctrine, et de la Compagnie du fonds perpétuel d'émigration. Les biens de ces corporations reviendraient au gouvernement fédéral et seraient utilisés au profit des écoles du territoire. Seuls étaient exemptés de la loi les cimetières et les bâtiments et terrains à fonction exclusivement culturelle. Cette loi fut dénoncée au Congrès par beaucoup de non mormons notables, mais le mouvement populaire contre la polygamie en assura le passage.

Le United States Marshal Dye se chargea des biens fonciers et personnels de l'Église. Pour conserver l'usage des bureaux de la dîme et du bureau de l'historien, l'Église paya au gouvernement un loyer annuel de 2400 dollars. L’Église paya 450 dollars par mois pour conserver l'usage de la Guardo House et une somme élevée pour obtenir l'usage de Temple Square.

Pendant cette période, l'Église eut de grosses difficultés financières. Elle ne pouvait pas emprunter le moindre dollar. Seul le paiement des dîmes par ses fidèles lui permit d'affronter cette situation. Des lieux de cachette, généralement appelés « underground », la Première Présidence exilée dirigeait les affaires de l'Église. John Taylor mourut en exil le 25 juillet 1887 à Kaysville en Utah.

Après la mort de John Taylor, la croisade contre la polygamie continua, mais avec une grande tolérance de la part des officiers. Le président Grover Cleveland pardonna à un certain nombre d'hommes qui avaient reçu de lourdes condamnations, parmi lesquels Charles Livingston, Rudger Clawson et Joseph H. Evans.

En Idaho et en Arizona, l’opposition contre la polygamie devint intense. En 1885, la Législature de l'Idaho passa une loi qui privait de leurs droits électoraux tous les membres de l'Église qui enseignaient pareille doctrine, ce qui privait tous les mormons du droit de voter ou de détenir des offices, qu'ils soient ou non polygames. Bien que mise en doute, la constitutionnalité de la loi fut maintenue par la Cour Suprême des États-Unis dans une décision rendue le 3 février 1890. Un projet de loi du même genre, appelé le « Stubble Bill », fut introduit au Congrès pour le territoire d'Utah. Même des non mormons éminents d'Utah s'y opposèrent, et il fut rejeté.

 

Manifeste

Au sein de ces difficultés, Wilford Woodruff, qui avait été soutenu comme président de l'Église le 7 avril 1889, suspendit le « mariage plural ».

Les lois contre la polygamie avaient imposé aux membres de l'Église un dilemme. Ils devaient désobéir, soit à la loi divine, soit à la loi du pays. La décision fut pour eux un soulagement. Le 25 septembre 1890, le président Woodruff proclamait son célèbre « Manifeste » qui mettait fin à la célébration des mariages pluraux dans l'Église et demandait aux saints d'obéir à la loi du pays. À la conférence générale d'octobre, le « Manifeste » fut soutenu et devint ainsi obligatoire pour l'Église.

À cette conférence, le Wilford Woodruff déclara : « Je tiens à dire à tout Israël que la mesure que j'ai prise en publiant ce Manifeste ne l'a pas été sans prière fervente devant le Seigneur… Je n'ignore pas les sentiments qui ont été suscités par ce que j'ai fait… Le Seigneur ne me permettra jamais, ni à moi, ni à aucun autre qui remplit le poste de président de cette Église de vous conduire dans l'erreur. Ce n'est pas dans le programme. Ce n'est pas dans la volonté de Dieu. Si je devais l'essayer, le Seigneur m'ôterait de ma place » (Conference Report, octobre 1890).

Le résultat du Manifeste fut un changement notable dans l'attitude vis-à-vis de l'Église. Le 4 janvier 1893, le président Harrison fit une déclaration d'amnistie à ceux qui avaient contracté des « mariages polygames » avant le 1er novembre 1890. Les restrictions contre le droit de vote furent supprimées en 1893 et les biens personnels de l'Église furent rendus à leurs propriétaires. Trois ans plus tard, lorsque l'Utah reçut le statut d'État, les biens fonciers qui avaient été confisqués furent de même rendus à l'Église.

Au cours des années qui suivirent le Manifeste, des mariages pluraux furent célébrés en dehors des États-Unis avec l'accord de la Première Présidence de l'Église. Le second Manifeste de 1904 marqua l'abandon définitif des mariages pluraux dans le monde entier (Gregory L. Smith, M.D., Polygamie, prophètes et esquives, FAIR).