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L’étonnant parcours d’une jeune femme d’Armentières

Ketty, danseuse orientale au Caire

Au fond de la cité Sans Pareille, rue Deceuninck, une tête brune passe a la fenêtre du 1er étage : La Voix du Nord ? Je descends. Quelques secondes et la porte s’ouvre sur un charmant sourire. Le cheveu ondulant sur les épaules, le corps moulé dans un pull prune, des jambes fines que révèle une courte jupe, Ketty ne s’étonne nullement de l’effet qu’elle peut produire. Et à peine de devoir raconter la trajectoire étonnante qui a propulsé cette fille d’un milieu modeste à triompher en danseuse orientale dans les palaces du Caire. Résumé de deux heures d’entretien aux quelles ont discrètement participé Lucie, la maman, aurélie, la nièce et …trois caniches.

Vous êtes vraiment d’Armentières ?
J’y suis née, Ketty Gourlet, le 16 juillet 1973. J’ai une grande sœur Lydie, un papa, ouvrier imprimeur, une maman à qui je dois beaucoup. Je suis une Armentiéroise normale (elle éclate de rire)
Tous les chemins mènent à Rome : Le votre en Egypte. Bizarre…
Il n’y a pas de mystère. Je voulais être prof de technologie et, à 20 ans, j’ai dû arrêter à cause de graves brûlures allergiques au visage… j’étudiais à Lille les compositions des produits cosmétiques. J’ai dit à maman : je prends une année sabbatique.
Et maman vous offre un voyage en Egypte ?
Pas du tout. Elle me gronde : « Tu ne vas pas rester sans rien faire ! » Là-dessus, nous lisons dans un gratuit une offre d’emploi : une boîte de nuit d’Anzin cherche une danseuse orientale professionnelle.
Attendez. Vous n’y connaissez rien à ce moment de l’histoire ?
Rien. J’appelle le gars au téléphone et je lui dis que je suis une pro. « Venez me voir ».
Trois jours plus tard, je vais le trouver. Avec maman, je précise. Le gras m’avait dit : « une vache est une vache : un boeuf est un bœuf, alors vous êtes danseuse ou non ? » le genre de phrase qui inquiète, non ?
Euh… ça ne me dit pas comment vous avez convaincu un patron de boîte d’origine méditerranéenne et connaisseur en danse orientale.
Je ne tombais pas de la dernière averse. Toute petite, je me produisais avec la famille dans les costumes, On a gagné des prix. J’ai été élue plusieurs fois miss Valenciennois en particulier et le patron du (Star White) m’y avait vue. Moi la timide, j’ai toujours été à l’aise sur scène. D’ailleurs j’étais bonne en danse au point d’avoir participé à des concours. (J’ai même battu un couple pro à Saint-André !)
Puis d’avoir fondé un groupe « le Loli Pop ». (Elle se lève et ramène un pessbook de la taille d’un annuaire des postes).
Vous êtes jolie fille, mais de là à briller en danse oriental….
Le soir de l’appel au Star White, la télé donnait un « deux minutes » sur la danse oriental. Maman a réalisé en deux jours une tenue de scène : je me suis entraînée seule et quand le gars m’a vue danser devant un orchestre, il était scié. J’ai été embauchée, et à un cachet inespéré.
Vous voilà lancée ?
Je me produisais le vendredi. Avec succès. Mon audience s’est agrandie. On s’est mis à me demander un peu partout, dans la région, en Belgique. J’ai su de suite que j’avais cette musique dans le sang. Mais ça n’empêche pas de travailler son style. Pour moi danser, ce n’est pas juste une histoire de cachet (ou de coucher ; on y reviendra).
C’est un acte de générosité. Il faut entendre mille personnes vous réclamer sur l’air des lampions.
Mille Personnes !
Sur le Boccacio pour la croisière inaugurale de ce bateau égyptien. En 1999, avec maman, on est allées au Caire et là dans l’hôtel Sheraton le patron m’a fait signer un contrat sur ce bateau. En quelques jours, je suis devenue une star.
Dangereux, non ?
C’est vrai que j’ai été demandée plusieurs fois en mariage : une fois par l’épouse d’un très riche Egyptien à qui je plaisais beaucoup. Plus embêtant, l’exigence de certains hommes de pouvoir : j’avais le droit de travailler au Caire si je leur cédais. Je n’ai pas cédé et j’y travaille encore.
On vous laisse en paix ?
Des amis ont réglé le problème. J’ai appris l’arabe, j’ai un agent, j’ai un ami spécialiste en affaires commerciales. Apres deux ans de présence, je suis la 5 e meilleure danseuse oriental du Caire et la 1er Française à y réussir dans cette spécialité. Aujourd’hui, je travaille avec un orchestre et des danseurs. Un spectacle complet dont je suis la responsable.
Oui, mais alors pourquoi votre présence ici dans le Nord ?
J’espère y développer cette danse. Un jour peut-être faire venir l’orchestre. Il y a un public, je suis sûre…
Vous allez voter aujourd’hui ?
Ah oui, et deux fois plutôt qu’une !

J.-c. Delhermet